STRASBOURG :
« la saine laïcité » de l’Eglise
Aucune
voix des organisations laïques traditionnelles ne s’est élevée contre
cette visite divine à Strasbourg. Où est l’Observatoire français de la
laïcité ? Pourquoi reste-t-il atone ? Refuse-il de voir
l’immixtion du religieux dans le champ politique ?
Seul l’Observatoire
Chrétien de la Laïcité, groupant des associations en majorité catholiques, en
France, a désapprouvé fermement la décision d’inviter le pape à s’exprimer
officiellement devant le Parlement européen : « l’Observatoire
Chrétien de la Laïcité demande la séparation claire et nette des Institutions
religieuses et de l’Etat au sein des institutions européennes. C’est une des
conditions essentielles pour permettre aux européens de toutes convictions
religieuses ou non de vivre ensemble. »
Dans les mêmes
circonstances en 1988, Jean Paul II prêchait pour une nouvelle
évangélisation : « Le
combat que mène Jean-Paul II n’est pas politique, mais éthique et
culturel. »
disait LE MONDE. Cette visite avait soulevé bien des réactions de
plusieurs organisations laïques.
En 2014, les
intentions politiques et philosophiques, ainsi que les intentions stratégiques
sont encore plus évidentes. Excepté quelques voix isolées, plus personne dans
nos organisations laïques ne réagit à cette entorse de plus en plus cléricale.
L’Eglise a-t-elle toutes les compétences, qualités et expérience pour donner
des leçons de démocratie ?
La « nouvelle laïcité » de l’Eglise reprend racine en
Europe.
Une
séparation asymétrique prend corps. Le pape intervient dans le champ politique mais le politique,
lui, ne peut intervenir sur le terrain de l’Eglise. Ainsi, dans sa
dernière exhortation « Ecclesia in Medio Oriente » le pape Benoît
XVI précisait ce qu’il entend par laïcité, ce respect de la distinction de
la sphère religieuse et de la sphère politique appelées à se connaître, à
collaborer entre elles sans se mélanger : « La saine laïcité,
… signifie libérer la croyance du poids de la politique et
enrichir la politique par les apports de la croyance… »[1]
Eddy KHALDI
[1]
Dans sa dernière exhortation Ecclesia in Medio Oriente le pape Benoît XVI précise ce qu’il entend par
laïcité, ce respect de la distinction de la sphère religieuse et de la sphère
politique appelées à se connaître, à collaborer entre elles sans se
mélanger : « La saine laïcité, … signifie
libérer la croyance du poids de la politique et enrichir la politique par les
apports de la croyance, en maintenant la nécessaire distance, la claire
distinction et l’indispensable collaboration entre les deux. Aucune société ne
peut se développer sainement sans affirmer le respect réciproque entre
politique et religion en évitant la tentation constante du mélange ou de
l’opposition…. La prise de conscience de ce rapport approprié permet de
comprendre qu’il existe une sorte d’unité-distinction qui doit caractériser le
rapport entre le spirituel (religieux) et le temporel (politique), puisque tous
deux sont appelés, même dans la nécessaire distinction, à coopérer
harmonieusement pour le bien commun. Une
telle laïcité saine garantit à la politique d’opérer sans instrumentaliser la religion,
et à la religion de vivre librement sans s’alourdir du politique dicté par
l’intérêt, et quelquefois peu conforme, voire même contraire, à la croyance.
C’est pourquoi la saine laïcité (unité-distinction) est nécessaire, et même
indispensable aux deux » (n° 29).