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Commentaire de Fergus

sur Gaston


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Fergus Fergus 12 juin 2015 19:27

Bonsoir, Alinea.

Superbe texte. Et tellement bien observé.

A cet énorme détail près que ce ne sont plus des Gaston (ou des Eugène, ou des Léon) qui sont découpés, mis en sachets plastiques, puis mangés sans plaisir dans les cuisines du bon peuple. Et pour cause : enfermés entre des barres métalliques ou des murets de béton dans des univers concentrationnaires, les pauvres bêtes ne sont plus que des matricules et n’ont strictement aucun rapport avec la main (est-elle bien humaine ?) qui les parque ainsi et les engraisse avec une mixture dont il vaut mieux ne pas connaître tous les ingrédients. Ainsi va la vie moderne.

Ces braves animaux (j’aime beaucoup les cochons) ont pourtant eu de lointains ancêtres qui se nommaient réellement Gaston (ou Eugène, ou Léon) et qui passaient la nuit dans leur soue en grognant de satisfaction dans leur sommeil après leur repas du soir fait d’une soupe de patates, de navets et d’avoine : le matin, réveillés par le chant du coq, ils sortaient sur le pré communal (en Auvergne, on appelle ce lieu « le couderc »), en quête de friandises déterrées ici, ou de châtaignes tombées là. Un pur bonheur, cette vie-là, pour Gaston (ou Eugène, ou Léon).

Enfin, jusqu’au moment où, à l’automne, l’un de ces gaillards était choisi pour nourrir la famille du maître durant des mois grâce à sa viande salée, ses boudins, ses saucisses, et ses jambons mis à sécher dans la salle commune de la ferme, accrochés aux poutres du plafond, à côté du ruban tue-mouches et de la lampe à contrepoids. Mais avant de passer la lame sur le cou du « Moussu » (le Monsieur), au moins l’avait-on remercié avec déférence pour ses faveurs alimentaires à venir et en le priant sincèrement d’excuser cette mauvaise manière faite à sa personne.


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