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Commentaire de Pierre Régnier

sur Alain Finkielkraut, vos Répliques à la théologie criminogène c'est pour quand ?


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Pierre Régnier Pierre Régnier 20 août 2015 01:05

Omar

 

A propos de mes "nauséabondes idées" voici comment je disais moi-même en mars 2000 (1) ce que vous répétez ici : l’antisémitisme est un concept totalement et foncièrement chrétien.

 

Dans le Décalogue, où l’on voit à juste titre d’excellentes bases morales de la civilisation judéo-chrétienne, il y a aussi cette précision que l’on oublie généralement : Yahvé s’y déclare par la voix de Moïse "un Dieu jaloux, châtiant la faute des pères sur les fils, sur la troisième et la quatrième génération" (Ex 20). Mais plus tard Jérémie (Jr 31, 29) et surtout Ézéchiel (Ez 18 et 33, 10) modifient cette conception et établissent la nouvelle règle, celle de la « rétribution personnelle », inclue dans la Nouvelle alliance : "Qu’avez-vous à proférer ce dicton en terre d’Israël : Les pères mangent du raisin vert, et les dents de leurs fils sont agacées ? .../... la personne qui pèche c’est elle qui mourra" (Ez 18).

 

Un autre prophète juif, Jésus, élargit encore la notion de justice, le rejet de la violence exercée contre les innocents et la générosité. L’amour du prochain, désormais, doit être universel, s’adresser à tous les peuples et non plus seulement au peuple élu. Dès son origine l’église catholique, traduisant dans les faits le terme grec « katholicos » par « totalitaire » plutôt que par « universel » a, sur le problème de la violence, non seulement annulé le progrès amené par Jérémie et Ézéchiel mais introduit une épouvantable aggravation de la conception énoncée par le Dieu jaloux de l’Exode. Son nouveau dogme de « Jésus homme-Dieu » l’a amenée à considérer logiquement que ceux qui l’avaient condamné à mort étaient « déicides » mais elle n’a pas arrêté là sa folie interprétative. Elle a décidé que ce n’étaient pas seulement les quelques juifs qui, avec Pilate, avaient effectivement prononcé la sentence qui se faisaient déicides mais aussi tous leurs contemporains juifs qui refusaient le nouveau dogme. Puis elle est allée beaucoup plus loin encore : seraient aussi éicides tous leurs descendants. Et pas seulement jusqu’à quatre générations : presque vingt siècles plus tard ceux des juifs qui continuaient toujours la tradition de l’Ancien Testament étaient encore considérés comme déicides par le catholicisme papiste.

 

(1) Ce texte était titré Désacraliser la violence religieuse. Je n’ai pu le publier ni dans la petite revue philosophique qui proposait un débat sur le thème La religion à quoi bon  ? et pour laquelle je l’avais écrit, ni plus tard, après le 11 septembre 2001, chez l’un des quarante éditeurs auxquels je l’ai proposé avec d’autres textes. C’est aujourd’hui que je souligne le passage relatant la création et la culture de l’antisémitisme par l’église catholique.

 


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