@jaja
Il faut déjà rappeler qu’il n’a jamais été idéologue du parti et était très critique à l’égard du catéchisme marxiste-léniniste. Ensuite, qu’il minore le rôle du PCF dans l’échec du mai populaire-ouvrier, certes. Mais cela n’enlève rien à la qualité de sa magistrale démonstration. Mai 68 fut avant tout la prise du pouvoir politique et culturel par les nouvelles couches moyennes et cette contre-révolution libérale était, sans doute, gagnée d’avance pour les raisons déjà évoquées.
On peut aussi, en effet, comprendre certaines formes d’anti-syndicalisme et le rejet des « avant-gardes » (chiens de garde ?) quand on sait que la CGT a renoncé à l’abolition du patronat et du salariat dans la foulée de Mai et que Marchais, par ex., a fait preuve d’amateurisme politique face au cynique Mitterrand.
Enfin, il est évident qu’il y a d’autres critiques à faire. A titre d’exemple, comme la plupart des marxistes, Clouscard méprise (?) les penseurs socialistes non-marxistes, mais aussi les travaux d’anthropologie politique de l’anarchiste Pierre Clastres (la violence dans les sociétés communistes primitives, la guerre intertribale pour empêcher l’émergence de l’État, du politique, finalement de la conscience historique).
On peut aussi discuter du fait qu’il considère qu’il y a un saut qualitatif entre la pensée mythique (qui serait un stade dépassé de l’évolution des sociétés humaines) et la conscience historique... qu’il ignore (ou veut ignorer) la cohabitation de la pensée mythique et de conceptions cycliques du temps (le simple constat de cet état de fait vous classant immédiatement dans la catégorie « réactionnaire ») avec une conception linéaire du temps (le temps du progrès) chez l’homme moderne.