@Yanleroc
Je n’ai pas dit que nous étions des machines, je n’ai pas parlé de fatalité non plus.
Cependant, quoique vous en pensiez, et le fait que vous et moi soyons capable de conserver une pensée indépendante ne signifie pas que le phénomène de soumission n’existe pas. Il est en fait suffisamment commun pour être constaté un peu partout, notamment dans tout phénomène social ou micro-social, comme les associations par exemple.
C’est un fait sociologique notoire, difficile à nier, qui conditionne largement les rapports sociaux en général, et que n’empêche pas que le fait qu’en dehors des dominants et des soumis, il y ait également des indépendants. En éthologie, puisqu’il en était question, il s’agit de la posture oméga, qui correspond en plus de l’indépendance à un statut encore inférieur, hiérarchiquement parlant. Elle n’est donc pas une primauté de sapiens sapiens... et vous ne savez pas, en réalité, si nos ancêtres les plus anciens ne philosophaient pas déjà, mais là n’est pas la question puisqu’il a bien fallu que le phénomène apparaisse un jour.
Par ailleurs, je ne crois pas plus à un homme providentiel (Robespierre ne nous a pas amené la liberté davantage que Jésus ne nous a amené la parole de Dieu) qu’à l’idéal à la manière de Chouard, mais je ne perds pas espoir pour autant. Il y a une marge pour que les idées de toutes les personnalités anti-conventionnelles puissent être expérimentées.
Quant à ce que vous dites sur l’impuissance, c’était le thème d’un de mes derniers articles de blog, où je parlais justement de l’organisation de l’impuissance au sein du système civilisationnel actuel. Cette impuissance n’est pas qu’un sentiment, une croyance, elle est aussi un fait que tout un chacun rencontre lorsqu’il espère ou tenter de changer les choses à notre époque. Et cela ressort entre autres d’un fait trop peu évoqué en sociologie humaine qui tient au fait qu’alpha et bêta collaborent ensemble à tenir les oméga sous contrôle et en marge du système de pouvoir. Ce qui conduit à ce que, toujours minoritaires, affaiblis et isolés, ceux qui pensent en dehors de la masse sont ceux qui sont les plus réduits à l’impuissance. Il n’est ni sage ni efficace de faire abstraction de ce rapport de force naturellement déséquilibré qui imprègne tout le monde humain depuis la plus ancienne préhistoire. Ni notre intellect, ni nos facultés conceptuelles ou d’abstraction ne nous en préservent, au contraire, ces traits tendent à maintenir la conscience de ce fait hors de notre portée. Et la condition d’humain dont vous parlez inclut cela bien davantage qu’elle ne l’exclut. C’est une part non négligeable de ce qu’est l’humain.
Il est bien entendu possible de dépasser ces inconvénients, car il n’existe nulle fatalité. Mais cela implique une lucidité qui inclut ces faits dans l’équation à résoudre pour tous mieux vivre ensemble. Pour le moment, Chouard, puisque vous le citez, est toujours maintenu en minorité, ridiculisé par certains, disqualifié par l’ensemble du pouvoir qui souhaite maintenir le statu quo en sa faveur. Je n’ai personnellement rien contre ses idées, je crois qu’elles sont un choix de société aussi réalisable qu’un autre (et aussi imparfait que d’autres, mais bien certainement meilleur que ce que nous avons actuellement). Mais dans la perspective de l’impuissance organisée, et de l’inconscience de l’humain envers sa propre nature, ses idées restent une utopie tant qu’une masse critique d’humains ne souhaiteront pas les mettre en place quoiqu’il en coûte, et le coût qui sera le plus important le sera pour l’oligarchie corrompue en place au moment où je parle. Comme je le disais plus haut, ce n’est pas en trainant des pieds dans des marches pacifiques marginales et minoritaires que cela arrivera, car comme le disait Lordon, la révolution n’est pas un picnic.
https://www.youtube.com/watch?v=4PEJlSvVZaY