« Le mot terrorisme est devenu le vecteur d’une idéologie jusqu’à créer une pseudo-réalité qu’il entend décrire. »
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Invoquer Ferdinand de Saussure et même la vieille querelle des universaux, c’est très bien, mais ça mène à quoi ? Il y a les mots, certes, mais il y a aussi les choses, et c’est la chose qui nous préoccupe en ce moment, bien plus que le mot, quel que soit par ailleurs celui dont on se servira pour la désigner. Je crains par conséquent que cette belle dissertation ne fonctionne à la manière d’un écran de fumée destiné à nous empêcher de voir la réalité des choses. Les médecins de Molière sont pareillement capables de disserter à perte de vue et d’invoquer mille concepts constitutifs de leur science pour essayer, quand on leur demande des remèdes, de comprendre quelque chose à la pathologie d’un malade... « qui mourut hier ».
C’est hier que sont morts les spectateurs réunis dans la salle du Bataclan, et pas mal d’autres aux terrasses des bistrots du 11e. Peut-on définir ça comme une « pseudo-réalité » ? Peut-être conviendrait-il d’interroger à ce propos les familles des victimes.
Et cette « pseudo-réalité » de dizaines de cadavres est-elle le résultat d’une « idéologie » particulière de ceux qui, face à l’innommable, se souvenant des massacres de septembre 1792 qui inaugurent cette période de l’histoire qu’on appelle la Terreur, ne trouvent pas d’autre mot dans l’immédiat et parlent, pour faire vite, de « terrorisme » ?
On avait déjà excusé les gentils utilisateurs de la kalachikov par le colonialisme : ce n’était au fond qu’une réponse bien légitime du faible au fort, mais maintenant, c’est la langue française elle-même qui sera coupable. Salauds de grammairiens ! Salauds d’académiciens qui, depuis plus de trois siècles qu’ils travaillent à codifier la langue, n’auront pas su faire correctement leur boulot. Les vrais responsables des massacres de 2015, c’était eux et on ne le savait pas encore. Je vois qu’il serait grand temps de niquer enfin la langue française, notre mère à tous.