• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de Milla

sur Syrie : champs de bataille de la guerre mondiale ?


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Milla (---.---.1.10) 16 juin 2016 23:54

Pour contrôler l’opinion publique, le gouvernement russe pratique la désinformation à grande échelle. En infiltrant les réseaux sociaux et les autres médias, il cherche à donner une crédibilité aux messages pro-Kremlin qu’il diffuse. Françoise Daucé, spécialiste de la Russie, analyse ce phénomène.

“Le gouvernementrusse utilise internet à son profit.” Pour Françoise Daucé, directrice d’études à l’EHESS et auteur de Une paradoxale oppression (CNRS Editions), le constat est sans appel. L’exemple le plus flagrant : l’Internet Resaerch Agency. Cette agence, installée dans un bâtiment discret au sein d’un quartier calme de Saint-Pétersbourg, est une base de désinformation digitale. Ses employés, environ 400 personnes, ouvrent des comptes sur les réseaux sociaux et créent des commentaires, des statuts, mais aussi des blogs, notamment sur la plateforme du Live Journal. Ces soldats du trolling gagneraient le salaire d’un professeur de faculté.

L’objectif : manipuler les internautes. Les employés de l’agence dissimulent leurs messages pro-Kremlin entre deux publications apolitiques, comme des photos de mode ou des articles de sport. Ludmila Savchuk, une ancienne employée, raconte au New York Times, qu’elle avait un quota de 5 posts politiques par jour, 10 non politiques et de 150 à 200 commentaires positifs sous les articles écrits par ses collègues. Marat Burkhardt a travaillé pendant deux mois au service des forums. Il postait 135 commentaires par jour. Ces derniers vantaient majoritairement Poutine et sa politique, notamment sur le conflit entre la Russie et l’Ukraine.

Les manipulations des médias existait déjà dans les années 80, rappelle Françoise Daucé : à cette époque, dans les médias russes, “tout se vend”,  “on peut acheter du contenu dans toute la presse -écrite radio télé- avec des articles de commande utilisés pour discréditer un concurrent”.

En décembre 2011, lors des manifestations de l’opposition qui dénonçaient les fraudes aux élections parlementaires, la guerre de l’information s’est installée sur le net. La bataille se joue notamment sur Twitter, où les hashtags contre Poutine finissent par être les plus relayés.

“Avec l’Internet Research Agency, on assiste à un effet de concentration du trolling”, analyse Françoise Daucé. Le trolling de l’IRA consiste notamment à publier des commentaires négatifs sous les articles des journalistes. Une offensive couplée avec un changement de législation. En 2013, l’arsenal législatif qui encadre les publications sur internet est renforcé. Une loi stipule que les sites sont désormais responsables des commentaires de leurs lecteurs. Toute publication contenant des propos injurieux, pornographiques, encourageant au suicide ou à la consommation de drogue, ou véhiculant des idées extrémistes est interdite. Pour Françoise Doucé :

Une page comprenant des propos illégaux dans ses commentaires reçoit un avertissement, pouvant conduire à sa fermeture (…) L’inquiétude vient des provocateurs qui publient exprès des commentaires illégaux pour créer des problèmes à la rédaction”.

Le but de l’agence ? “Discréditer internet en Russie“, explique la spécialiste. En accentuant toutes les critiques sur la toile, le Kremlin cherche à discréditer les posts de l’opposition. La protection de l’enfance devient aussi un prétexte pour fermer abusivement des sites politiques. De plus, l’Etat finance l’organe de contrôle d’internet, l’agence Koskomnatzov. Cette dernière tient un registre de recensement des médias et contrôle leurs contenus. Depuis 2013, les blogs de plus de 3000 vues par jour sont obligés de s’y enregistrer. L’an dernier, cinq sites critiquant la politique de Moscou ont été fermés.

Selon Françoise Daucé, le relais de la politique de Poutine se fait aussi dans les médias occidentaux, à travers “un usage politique d’internet”. Le site francophone Sputnik (anciennement La Voix de la Russie) diffuse ainsi des articles pro-Kremlin. En novembre 2014, le site publie une interview de l’eurodéputé FN Aymeric Chauprade. Ce dernier est interrogé au sujet del’emprunt de 9 millions d’euros contracté par le parti d’extrême droite à une banque russe. . Dans la même veine, la chaîne RussiaToday, aujourd’hui anglophone et hispanophone, vient de s’implanter au Royaume-Uni. Grâce à ces médias russes qui s’exportent, le gouvernement “instaure une campagne de “ré-information”  sur la scène internationale.


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès