Jandre, voyez-vous, le problème est aussi celui de la liberté effective de chacun de décider de sa mort.
Liberté de celui qui aura exprimé une option en faveur de l’euthanasie un jour et serait dans l’incapacité de la renier. Liberté de ne pas être considéré comme un être indigne parce que l’on persiste à vouloir vivre, ce que le discours de certains, en creux, finirait pas faire assimiler à de la lâcheté.
Faisant face au risque d’avoir un enfant trisomique, ma propre grand-mère m’a expliqué que je n’avais pas le droit d’imposer cela à la société. Eh oui, parce qu’un enfant trisomique, ça fait pas beau dans le tableau, et ça coûte à la société. De fait, on est parvenu à effacer ce problème, puisque les enfants non-normaux ne naissent plus, pratiquement.
Comment trouvez-vous, humainement, la situation du patient qui va bientôt mourir, ne sachant, probablement, pas s’il y a quoi que ce soit après, ou s’il va définitivement basculer dans un grand néant, et qui aura en face de lui le regard de certains qui ne pourront s’empêcher de penser qu’il a tort de « s’accrocher », et qu’au demeurant, c’est beaucoup d’argent de dépensé pour un résultat connu d’avance ? Et, dans la tête de celui qui voit son corps s’enfuir, qui est déjà en situation de devoir accepter qu’on lui fasse sa toilette, faut-il ajouter la conscience de ce que la société considère qu’il devrait tout de même mourir dans la dignité, c’est-à-dire abréger tout cela ? Allons, mon bon monsieur, un peu de dignité !
Tout homme, toute vie, toute mort est digne. Digne en elle-même. Digne d’être respectée. Digne d’être accompagnée.