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Commentaire de Bertrand Cassoret

sur L'électricité sans le nucléaire ? C'est possible et… moins cher !


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Bertrand Cassoret Bertrand Cassoret 4 novembre 2016 15:08

L’étude de l’ADEME « Un mix électrique 100 % renouvelable » parue en 2015 concerne l’électricité et non l’énergie, soit 23% du problème énergétique. Ce n’est pas un scénario de transition puisqu’elle n’explique pas comment passer du système actuel à ce nouveau système. Il s’agit d’un travail « à caractère prospectif et exploratoire ». Il me semble que l’enthousiasme qu’a suscité cette étude peut être modéré car elle considère dans son scénario « de référence » :

- Une consommation d’électricité en baisse à 422 TWh par an contre environ 440 TWh (consommation nette) en 2015 ; et ceci malgré 10 millions de véhicules électriques (sur 38 millions de véhicules actuellement en France), malgré la croissance démographique et sans doute économique.

- L’utilisation de bois ou de biogaz pour produire de l’électricité, ces sources d’énergie seraient alors moins disponibles pour le chauffage.

- Des moments où il faudrait importer de l’électricité depuis l’étranger, non forcément produite par des renouvelables.

- Du stockage par batterie dont le bilan environnemental est médiocre, il faudrait plusieurs millions de tonnes de batteries dont la durée de vie est limitée.

- Une augmentation du nombre de Stations de Transfert d’Energie par Pompage (lacs artificiels ou barrages permettant un stockage indirect de l’électricité), sans qu’il soit précisé où construire de nouvelles immenses retenues d’eau. Rappelons la forte opposition qu’a rencontrée la construction du barrage de Sivens.

- Un important stockage par « Power to gas », technique permettant de transformer de l’électricité en gaz (hydrogène ou méthane), puis éventuellement en électricité. Cette technique est prometteuse mais encore balbutiante et sans réel retour d’expérience. Elle n’existe actuellement que sous forme expérimentale, compter largement dessus est donc assez ambitieux.

- Un énorme développement de l’éolien dont la production serait de 303 TWh par an alors qu’elle était au maximum de 160 TWh dans le rapport publié par l’Ademe en 2013. La production éolienne a été en France de 21 TWh en 2015, il faudrait au moins 10 fois plus d’éoliennes qu’aujourd’hui.

- Un facteur de charge optimiste de l’éolien terrestre de 31 % alors qu’il n’est actuellement que de 23 % (le facteur de charge est le rapport entre la puissance moyenne réelle et la puissance installée, il rend compte du fait que le vent ne souffle pas toujours suffisamment).

- Une puissance éolienne installée de 96GW contre 10GW en 2015. Sachant qu’on a installé en France moins de 1GW par an ces dernières années, il faudrait 86 ans au même rythme pour arriver à cette puissance, mais la durée de vie d’une éolienne est inférieure à 25 ans.

- D’importants reports de consommation (60 TWh) des usines, de chauffage des maisons, de chauffage de l’eau ou d’usages d’appareils électro-ménagers. Il faudrait, essentiellement en fonction du vent, parfois décaler leur mise en marche lorsque la production ne suffit pas. Il s’agit donc d’une tendance vers un moindre confort puisqu’il faudrait parfois décaler les horaires de travail des salariés, éviter de chauffer son logement lorsqu’il fait froid, de faire la cuisine lorsqu’on a faim…

- Un ajustement offre-demande modélisé trop peu finement, les auteurs soulignant eux-mêmes que la gestion de la stabilité du réseau électrique n’est pas traitée dans l’étude.

Indépendamment des problèmes d’intermittence et de stockage, cette étude de l’Ademe précise que le productible maximal théorique des renouvelables est, en France, de 1268 TWh. Mais l’Ademe souligne que « rien ne garantit l’adéquation, à chaque instant, entre production et demande ». Ce chiffre ne signifie donc pas que l’on puisse disposer de toute cette énergie : il faudrait lui soustraire les inévitables pertes de transport et de stockage, et surtout ce que l’on ne serait pas capable de stocker car pas forcément produit au moment où l’on en a besoin. Ce chiffre de 1268 TWh, bien que paraissant assez optimiste, reste nettement inférieur à la consommation d’énergie française (1900 TWh en énergie finale payée par le consommateur, presque 2900 TWh en énergie primaire avant toute transformation) et ne fait que confirmer la conclusion  : il faudrait considérablement diminuer notre consommation d’énergie pour sortir des fossiles et du nucléaire.

http://www.agoravox.fr/actualites/environnement/article/non-il-n-existe-pas-de-scenario-186171


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