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Commentaire de Jacques-François Bonaldi

sur La belle « démocratie » de Fidel Castro


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Jacques-François Bonaldi 2 décembre 2016 06:36

III

Bref, les choses à Cuba sont différentes et juger ce système à partir des conceptions d’une République bourgeoise serait faire fausse route. À son article premier, la Constitution précise : « Cuba est un État socialiste de travailleurs, indépendant et souverain, organisé avec tous et pour le bien de tous [idée de Martí], en tant que République unitaire et démocratique, pour la jouissance de la liberté politique, de la justice sociale, du bien-être individuel et collectif et de la solidarité humaine ».

Ainsi donc, contrairement à ce que pensent Obama et ses experts, le peuple cubain « vote pour ses dirigeants ». Pas directement, certes, mais c’est aussi le cas aux États-Unis où le vote des grands électeurs l’emporte sur celui des citoyens (ou plutôt de la moitié des citoyens, puisque, on le sait, à peine la moitié des électeurs vote, face à 95 p. 100 de participation à Cuba). Bref, une fois de plus, Obama nous sort un cliché fondé sur l’ignorance ou la mauvaise foi, et comme ce n’est le premier de son discours, il en devient lassant ! Si « voter pour ses dirigeants », c’est imiter le cirque électoral de son pays, eh bien, non, c’est vrai, les Cubains ne votent pas comme ça, et c’est tant mieux. L’exercice électoral est bien plus sérieux ici que chez lui. Une dernière remarque : ici, contrairement à ce qui se passe dans maints pays du Tiers-monde et dans un certain nombre du Premier, les urnes sont surveillées, non par des soldats en treillis, l’arme longue au poing, mais par des écoliers pour lesquels ce geste fait partie de leur éducation citoyenne…

Quant au fait qui scandalise Obama (et il faut le sous-entendre dans sa critique du système électoral cubain), à savoir qu’un Fidel Castro puisse mener les rênes du pays depuis 1959 et qu’il ait élu et réélu député depuis 1976 et ce jusqu’à 2006, soit trente ans, et que les électeurs de sa circonscription, dans l’Est du pays, continuent, bien qu’il se soit retiré de la vie publique, de l’investir et de l’élire, eh bien il s’explique très aisément. Mais pour cela il faut passer à une autre dimension. Raúl Castro affirmait en 2006 :

"Nous faisons face à un ennemi que son entêtement et son arrogance poussent très fréquemment à commettre des erreurs, mais cela ne veut pas dire qu’il soit idiot. Il sait que la confiance spéciale que le peuple place dans le leader fondateur d’une Révolution ne se transmet pas, comme s’il s’agissait d’un héritage, à ceux qui occuperont à l’avenir les principales responsabilités à la tête du pays."

"Je répète ce que j’ai affirmé à maintes reprises : il n’y a qu’un commandant en chef de la Révolution cubaine, un seul, et uniquement le Parti communiste, en tant qu’institution qui regroupe l’avant-garde révolutionnaire et qui est la garantie sûre de l’unité des Cubains pour tous les temps, peut être le digne héritier de la confiance que le peuple a déposée en son leader."

Tant qu’on refusera de comprendre que Fidel (et sa Révolution, celle du peuple cubain, rappelons-le constamment) est plus qu’un fondateur de République, mais, disons-le carrément, le fondateur de la nation cubaine enfin libre et indépendante, de la nation cubaine enfin digne de ce nom, de la nation cubaine enfin trouvée et retrouvée face à elle-même, on ne saisira jamais ce qu’il représente à Cuba et pour Cuba et pour la majorité de la population cubaine : un dirigeant dont la légitimité ne provient pas de bulletins de vote (encore que, je le rappelle, il ait été élu et réélu tous les cinq ans comme député pour pouvoir être élu président du Conseil d’État), mais de son action révolutionnaire, de sa stature historique. Et ce, n’en déplaise aux médiocres de ce monde que les hauteurs étouffent.

(fin)

 


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