Remarquable article, passionnant.
Il pose une problématique qui frappe lorsqu’on étudie le nombre de victimes dans les guerres et la cause de leur mort. (et justement, la cause objective).
Par exemple dans la Guerre de Crimée ( Angleterre et France contre la Russie , entre 1853 et 1856), la plupart des victimes ont succombé aux conditions de vie ( hygiène, nourriture) et les civils ne sont que du côté russe, les assaillants faisant, en toute bonne conscience, le siège de Sébastopol. Il y a un aspect de classe évident, qui se traduit par le traitement différencié des officiers et des soldats.
Durant le blocus de Leningrad par les nazis, le but de ceux-ci était de provoquer par le blocus la mort de millions de personnes en quelques semaines. Mais par une logistique optimisée, une volonté de fer pour résister et bien sûr des combats acharnés, les Soviétiques ont tenu 900 jours et ont gagné. Le but était donc une extermination de la population civile, sans souci de sa religion.
Or on ne présente pas cette extermination-là comme telle.
Contre Cuba, les Etats-unis ont employé comme arme bactériologique la contamination du bétail, de façon à faire périr la population par la faim ( sous prétexte qu’elle se révolte d’abord contre son propre gouvernement). ( lire le livre d’Ignacio Ramonet ) Or ils ne sont pas incriminés pour autant.
La France coloniale elle-même a utilisé l’arme bactériologique dans les années 20 pour mater la population malgache. Mais l’administrateur a effacé des archives les statistiques. Le nombre des victimes est considérable, si l’on considère la décroissance de la population entre le début de la colonisation et les années 30. Les Français ont introduit le virus de la cochenille, provoquant la mort des zébus et des plantes dans le Sud malgache, qui est déjà désertique... L’idée était aussi de détruire les buissons où se cachaient les Malgaches en embuscade pour mener la guérilla contre les troupes coloniales ( et ses tirailleurs qui n’ont pas combattu que sur le champ de bataille européen !)/ Les biologistes, un temps effarés de ce qu’ils provoquaient, se sont vite rangés à la nécessité de combattre le virus ... de la résistance à la colonisation.
Donc le point que vous soulevez est très intéressant, peu abordé ( on comprend pourquoi) et essentiel.