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Commentaire de Christian Labrune

sur Pour en finir avec la castration


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Christian Labrune Christian Labrune 16 février 2017 17:17

. Il y a, par exemple, des corrélations fortes - visibles dans de nombreuses statistiques - entre la réussite scolaire et l’origine sociale des élèves.

@Jordi Grau

Il est très clair que lorsqu’on vient d’une famille de normaliens ou de polytechniciens, on risque moins de se retrouver à vingt ans, muni d’un simple BEP, caissière dans un supermarché ou magasinier dans une usine, que si on est issu d’une famille d’immigrés dans les territoires perdus de la république. Cela dit, un certain discours sociologique mis à la mode par les thèses de Bourdieu et Passeron des les années 60 aura eu bien des effets pervers et démobilisateurs : à quoi bon persévérer si on est condamné d’emblée par son origine sociale ? Le névrosé adonné aux thèses freudiennes croit que les carottes sont cuites parce qu’on lui a fait croire qu’il aura refoulé je ne sais trop quoi, mais celui qui fait confiance au discours sociologique ambiant se trouvera vite condamné, et plus gravement encore, à l’inhibition de l’action.
 Il y a bien vingt ans, j’avais dans une classe de seconde une élève tout à fait illettrée. Je l’avais quelque peu interrogée à la fin d’un cours pour essayer de comprendre l’origine de ses difficultés. C’est normal, m’avait-elle répondu : je suis fille d’ouvriers. Qu’est-ce que vous voulez dire ? « Ben mon prof, en troisième, il m’a expliqué que quand on est fille d’ouvriers, on ne peut jamais arriver à s’exprimer correctement en français ! ». La malheureuse avait si bien fait confiance à ce criminel abruti qu’elle s’accommodait déjà d’un échec dont elle ne pouvait pas être tenue pour responsable. Il ne me restait plus, au devoir suivant, qu’à la féliciter pour un « très réel progrès » tout à fait inexistant. Ce mensonge pédagogique n’aura évidemment pas produit des miracles mais lui aura quand même quelque peu redonné confiance dans ses possibilités.
A la même époque et dans une autre classe, la meilleure élève en français était fille d’immigrés algériens ; chez elle, on parlait arabe, et la bibliothèque devait être plutôt réduite. Elle écrivait néanmoins, sans autre soutien que les cours dispensés au lycée, un français impeccable. La dernière fois que je l’ai vue, elle finissait sa thèse de doctorat en économie !
Evidemment, les statistiques réduisent à peu de chose de pareils contre-exemples, mais c’est qu’on a depuis longtemps baissé les bras en matière d’instruction publique et de formation des intelligences. Ce qu’on enseigne aux jeunes, désormais, c’est la résignation, et tous les arguments qu’ils pourraient souhaiter pour justifier leur échec, on les leur fournit en abondance avec la plus extrême complaisance.
 


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