Dixit Louve (voir plus haut)
« Il est un paradoxe rarement soulevé : les
plus ardents adversaires de la colonisation se montrent la plupart du temps de
zélés partisans de l’immigration, surtout de celle provenant de pays
anciennement colonisés. »
C’est un
point de vue qui se défend et qui mérite débat.
Témoignage sans conclusion.
J’aurais
participé au contingent 1961-62 mais une faiblesse cardiaque m’exempta de cette
tragédie. Aurais-je obéi ?
L’étudiant idéaliste
et indépendantiste de dix-huit ans que j’étais, nourri de littérature
sartrienne et camusienne, aurait-il résisté à la pression militaire, à celle du
groupe incorporé, à l’idéal du devoir ? Mouais, je suis dubitatif.
J’aurais probablement
agi comme mes cousins ; de simples ouvriers : mouleur et plombier, honnêtes
garçons, sympathisants du Parti communiste, adhérents à la CGT, qui dans le même
temps, l’un, crapahute 28 mois à la frontière marocaine et l’autre, 32
mois, à la frontière tunisienne, à construire et surveiller la ligne Morice.
Tous deux, obstinément
contre cette opération de police et du maintien
de l’ordre, renâclaient,
pestaient. Contemplant la misère des
mechtas traversées et visitées ils se sentaient coupables de participer
à une véritable saloperie.
Que
faisaient-ils dans ce pays ? Ils avaient conscience que l’impérieuse mission
qui leur était confiée était antonymique à progrès et civilisation.
Eux aussi
pensaient l’indépendance inéluctable. Sous l’uniforme, ils étaient pour. Un sentiment
partagé par leurs camarades en tenue léopard.
L’un est
retourné quelques mois pour son travail en Algérie et de la période qu’il y
vécut il aura gardé de fameux souvenirs chaleureux. L’autre, artisan plombier, a
travaillé toute sa vie avec un compagnon maghrébin.