@Taverne
Pour bien comprendre ma démarche, il faut la voir comme une alternative à la démarche connexionniste qui considère que la douleur, le plaisir, les qualia des sensations sont une simple émergence des processus physico-chimiques mis en oeuvre dans le réseau connecté des neurones par la voie des synapses, des axones et des neurotransmetteurs. Je formule l’hypothèse que ces qualia ne se forment pas à l’intérieur de ce réseau mais à l’extérieur, à partir non de la transmission des potentiels d’action mais de l’effet d’une modulation de champ provoquée par l’oscillation des neurones quand ils déchargent.
A partir de là, il faut distinguer deux choses. D’une part la structure sur laquelle agit la modulation de champ et qui est effectivement encore inconnue. D’autre part la nature particulière de cette modulation qui, elle, est connaissable. Lorsque je dis par exemple que, pour que mon hypothèse soit vérifiée dans le cas du nématode, il faut que ses deux neurones AWA modulent différemment de ses deux neurones AWB, je pose une condition sine qua non. S’ils modulent de la même façon, ils envoient le même signal à la structure réceptrice, donc ils ne pourraient engendrer dans un cas du plaisir et dans l’autre de la douleur. Donc mon hypothèse est fausse. Point.
Ce qui m’encourage à penser qu’elle est vraie, c’est ce que je rapporte dans mon article « le modulisme ». Il s’agit d’expériences menées par une équipe de biologistes sur l’olfaction des souris. Ils ont réussi à montrer que, lorsque les souris étaient anesthésiées et donc inconscientes, la reconnaissance des odeurs par l’organisme se faisait par la population particulière des neurones activés. Et quand les souris étaient conscientes, la reconnaissance des odeurs se faisait par la répétition d’une activation séquentielle de neurones qui engendrait ainsi une modulation particulière à l’odeur concernée. Là c’est la même chose, on ne sait pas comment la modulation agit sur la structure réceptrice, mais on sait au moins que cette modulation est spécifique à chaque fois. Pour faire simple, je dirais que chaque odeur fait sonner un portable ayant chacun sa sonnerie propre. On ne sait pas quelle oreille interne entend cette sonnerie ni comment elle peut l’entendre mais on comprend qu’elle ne peut jamais se tromper sur l’odeur qui « fait sonner ».
je ne crois pas du tout, et là vous avez totalement raison, qu’on pourra dans un avenir proche au moins repérer l’existence, la structure et les lois mises en jeu par cette « oreille interne ». En revanche on pourra, ou on pourrait si on s’intéressait à l’hypothèse moduliste, faire un très grand nombre d’études par la voie de l’électroencéphalographie ou de la magnétoencéphalographie pour vérifier la pertinence de ses implications.