@Julien Esquié
« Les discriminations
juridiques sont inscrites dans la loi depuis la création de l’État ; les
discriminations socio-économiques découlent des conditions de vie
concrètes de la population arabe palestinienne et des discriminations juridiques auxquelles elle est confrontée. Les
unes et les autres façonnent la conscience collective des citoyens
arabes palestiniens d’Israël.
Le
droit israélien comprend quantité de dispositions qui affirment
explicitement l’inégalité entre juifs et Arabes et
l’institutionnalisent. (Pour ne citer qu’un exemple, le drapeau
d’Israël, frappé de l’étoile de David, ne représente que la majorité
juive de la population). Cette différence de traitement ne se limite
pas au champ symbolique ; elle existe dans tous les domaines trouvant
leur origine dans le statut juridique d’une minorité quelle qu’elle soit
: la définition de l’État et de ses symboles, l’immigration, la
citoyenneté, la participation à la vie politique, la terre, la culture,
la religion, la politique budgétaire, etc
Ainsi,
au titre de la Loi du retour, tout juif de par le monde peut obtenir la
citoyenneté israélienne, alors que les Palestiniens qui sont devenus
des réfugiés après la fondation de l’État se voient refuser ce même
droit.
Paradoxalement,
ces lois discriminatoires coexistent, au sein du système juridique
israélien, avec un ensemble de lois qui prohibent toute discrimination
fondée sur la race et/ou la nationalité en matière d’embauche et d’accès aux emplois publics.
Les normes juridiques discriminatoires persistent néanmoins, et ce
malgré l’obligation légale d’égalité précisée et renforcée par les
décisions de la Haute Cour de justice dans une foule de domaines,
parfois en lien direct avec la question de l’égalité entre juifs et
Arabes.
Vis-à-vis des citoyens arabes palestiniens, le droit israélien manifeste
une étonnante ambivalence normative : on y trouve de nombreuses lois
inégalitaires favorisant les juifs au détriment des Arabes, mais aussi
quelques lois interdisant toute discrimination entre les uns et les
autres. Dans les faits, ce sont les lois explicitement discriminatoires
qui imprègnent l’ensemble du système juridique israélien. Semblables à
une onde de choc, elles débordent leur champ propre et affaiblissent
celles qui ont pour fonction de poser le devoir d’égalité. Résultat,
leur effet se fait sentir dans pratiquement tous les domaines de la vie
quotidienne, y compris ceux où les normes juridiques sont censées être
égalitaires. »
https://www.cairn.info/revue-les-cahiers-de-l-orient-2009-3-page-47.htm