@ Gollum
Par canalisation/orientation de la sexualité, je n’entends pas criminalisation de celle-ci. Cette criminalisation est tardive dans l’Histoire, - 5 000. Niestzsche a donné le nom de Zarathoustra à son ’héros’ parce que, dit-il, Zoroastre passe pour l’inventeur de la Morale et qu’ayant rendu le monde malade, il lui revient en quelque sorte de le rétablir.
Il se trouve que vraisemblablement partout, en tous temps, en tous lieux, la sexualité libre, c’est-à-dire naturelle, n’est pas souhaitée et qu’en conséquence elle est orientée. Via les incestes, les interdits, etc. Sauf qu’avant la période morale, la justification de l’interdit n’est vraisemblablement pas bien/mal mais faste/néfaste. ’tu ne coucheras pas avec x parce que telle chose catastrophique va se reproduire’. A l’époque morale, cela devient ’tu ne coucheras pas avec x parce que c’est mal, parce que dieu l’a dit’. L’impact sur le psychisme de l’individu dans les deux cas est très différent ; dans le premier cas, l’individu va être amené à se surmonter, c’est une sorte de challenge* tandis que dans le second l’individu va culpabiliser (’je suis mauvais’) ; dans le,premier le désir est conçu comme normal mais dangereux et dans le second comme anormal, monstrueux.
Si on prend le cas des Trobriandais, leur sexualité peut paraître libre à nous autres mais ce n’est pas du tout le cas ; en fait, elle est licencieuse à nos yeux, parce que les enfants s’adonnent aux joies de la découverte entre eux sans que quiconque ne s’en offusque, parce qu’adolescents une maison centrale au village dite ’maison des célibataires’ est dévolue de façon obligatoire aux premières étreintes multiples (papillonnage, multipartenariat mais pas de sexe de groupe) et parce qu’adultes il y a toute une ambiance et des fêtes ou cérémonies sans équivoque, choses qui ne se font pas sous nos latitudes et que nous jugeons aberrantes. Mais ce n’est qu’une apparence car il y a des interdits implicites et explicites concernant l’inceste mère/fils par exemple (la structure est construite de façon à ce qu’il n’arrive pas), parce que l’adultère est sévèrement réprimé, etc, etc.
[j’ai mis obligatoire en gras car comme chez nous il y a une pression sociale, etc. Là-bas un individu sans grande appétence sexuelle est ou serait sommé implicitement de participer. Sinon il se heurterait à l’opprobre.]
*on retrouve cela, si je me souviens bien, dans la Torah, avant que la figure Moïse ne vienne tout corrompre avec son beau mental de psycho. Dans l’épisode d’Abel & Caïn, Iahvé dit à Caïn "le Péché est tapi à ta porte ; n’y aura-t’il pas élévation ?’ Autrement dit, nous sommes porteurs de désir qu’il est possible et qu’il convient de surmonter. Il s’agit d’une invitation, d’une stimulation, quelque chose d’optimiste au fond.
Avec Moïse, c’est ’Je suis Iahvé, le dieu jaloux, qui punit la faute des pères sur les fils
jusqu’à la millième génération’. Autrement dit, ’quoi que tu fasses, quoi que tu dises, c’est égal, tu n’es qu’une merde’.
Il me semble aussi qu’on retrouve l’idée de conséquence faste/néfaste. Le dieu expose bien que consécutivement à la Chute (Abel & Caïn sont les enfants d’Adam & Eve = la première génération d’après la perte du paradis primordial) nous sommes porteurs d’une nature ambivalente et que ce qui justifie nos actes c’est le faste ou le néfaste. En l’occurence, la terre se fait stérile.
On notera de plus la mansuétude du dieu qui marque d’un signe Caïn afin que nul ne l’assassine - alors qu’il est tout de même l’assassin de son propre frère - et on comparera avec les riantes innovations du Moïse où on lapide à mort pour une simple coucherie hors mariage. Pour extirper le mal, c’est la raison donnée.
Et pour coller tout ça à votre propos, il est évident que Jésus est sur une voie antagoniste à celle de Moïse. C’est une sorte de tentative à revenir à la morale précédente qui est en fait pragmatique et de type ouvert, en contradiction avec celle régnante qui est de type coercitif et dogmatique, figée. Il réfute avec une constance appliquée le grand délire mosaïque, dans les petites choses - ’que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre’ (= nous sommes tous porteurs du désir ambivalent ; il n’y a pas les bons d’un côté et les méchants de l’autre) comme dans les grandes choses - en finir une fois pour toute avec le Péché = rendre à l’Homme son innocence et sa possibilité de devenir, régler son compte à la culpabilité sans rime ni raison, poison instillé par l’autre maboule. Pas la peine d’évoquer la négation implicite de la paternité (Joseph réduit au rôle de figurant, m^me dans la conception !, mais figure implicite centrale du récit), démolition en règle de la notion d’élection, etc, etc.
25/04 23:03 - Méduse
Ceci posé, on essaiera de déterminer comment les pulsions peuvent s’objectiver chez un (...)
25/04 22:58 - Méduse
@ arthes Le conte de fées des parents purs est typique de notre culture. Reprenons le cas des (...)
23/04 15:41 - Ludongbin
@Philippe Content que vous ayez apprécié cette contribution / ce témoignage et les sources (...)
23/04 14:59 - Ludongbin
@Philippe Un bon (jeu de) mot et le sourire intérieur resurgit. Et en plus c’est (...)
23/04 00:13 - Méduse
@ Gollum Par canalisation/orientation de la sexualité, je n’entends pas criminalisation (...)
22/04 15:13 - Gollum
@Méduse pour justifier cette nécessité de dominer la sexualité, les seules pistes que (...)
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