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Commentaire de Ciriaco

sur Comment le revenu de base universel démontre la main invisible du marché régulateur


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Ciriaco Ciriaco 28 juillet 2018 15:21

Il faut pourtant repenser le travail, au moment où deux phénomènes se rejoignent : la robotisation, qui remplacera les petits boulots, et l’« assouplissement » du contrat de travail.


Objectif : baisser partout où c’est possible les coûts de production. On sait (le phénomène de délocalisation en est un signe fort) que ceci sera toujours une opportunité pour les détenteurs du capital de faire croître le développement d’entreprise, fût-ce au prix social le plus fort ou le plus inégalitaire.

En ce sens, la « main invisible », cette métaphysique du libéralisme économique, n’est pas départie des intérêts du capital et ne les dédouane qu’à partir du moment où le laisser-faire est une vertu faisant de la non-redistribution une norme individuelle débarrassée de morale.

L’idée des revenus de base a une compatibilité à la frontière avec la baisse des coûts de production ; ce n’est pas que les salariés ne « réclament » pas de plus gros salaires, c’est que les employeurs y voient une opportunité qui a en effet pour conséquence de paupériser les populations. Il s’agit donc de résonner dans une logique différente. Changer une règle d’un jeu qui reste le même parce que les vainqueurs entendent le conserver, non sans innocence, ne change rien.

Quelle logique derrière cela ? Quand on parle des revenus de base, on parle non seulement d’éradiquer la pauvreté mais aussi de redéfinir le sens de la productivité, tournée vers l’accumulation dans une société de non-redistribution. Il y a donc là un projet social et de nouveaux contrats sociaux, au sens de Durkheim.

Parler de projet social à ce sujet n’est pas donc neutre : il s’agit de sortir de la logique et de l’amoralité toute libérale de l’exploitation du nombre en guise de principe social, du laisser-faire et de l’égoïsme patent, pour reparler de contrat social, d’horizon, et de commun. Il ne s’agit pas de contourner la question du travail pour autant, mais de la rehausser avec, par exemple, le revenu contributif, revenu d’un travail plus libéré des tensions de marché, plus choisi, plus en accord avec les affinités de chacun. C’est aussi, en filigrane, un autre rapport, qui privilégie le sens plutôt que l’accumulation personnelle.

C’est une refonte du sens du travail, du commun social et de la liberté du sujet. Un projet d’une telle envergure dans le contexte d’une société dont le libéralisme des sujets l’emporte largement sur le commun (dès lors éclaté et tribalisé) est difficile à seulement aborder. La passivité que vous évoquez est liée à l’ontologie libérale : « profiter » fait partie du libéralisme, en est la conséquence ontologique, et l’ordre moral libéral dit seulement qui a la légitimité de le faire en fonction du compte en banque.

Il faut s’intéresser aux alternatives qui parlent du commun, d’autant quand celles-ci détiennent des clés de la fin de la pauvreté. Les condamner, pour au fond reconduire les forces dominantes, sera toujours plus facile, aurait peut-être dit, aussi, La Boétie.

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