Dans l’ » Origine de l’Homme » (1871), Darwin
voyait dans la religion et les « qualités morales » des caractéristiques
sociales humaines dues à l’évolution. Le rapprochement de la « croyance en Dieu
» et de la religion avec les thèmes des superstitions et du fétichisme montre
quel degré de vérité il leur accordait. Dans ce livre, il écarte un argument en
faveur du caractère inné de la religion :
« La croyance en Dieu a été souvent présentée
comme non seulement la plus grande, mais la plus fondamentale de toutes les
différences entre l’homme et les animaux inférieurs. Il est pourtant
impossible, comme nous l’avons vu, de continuer à prétendre que cette croyance
serait innée ou instinctive chez l’homme. Il est vrai cependant qu’une croyance
en des forces spirituelles qui agiraient sur tout semble être universelle ; et
elle semble le résultat d’un progrès considérable dans la raison humaine et
d’un progrès incessant dans sa capacité d’imaginer, de s’interroger et de
s’émerveiller. Je suis conscient que supposer qu’il existe une croyance
instinctive en Dieu a servi à bien des gens comme un argument en faveur de son
existence. Mais c’est un argument irréfléchi, puisqu’il nous obligerait à
croire à l’existence d’un grand nombre d’esprits cruels, malfaisants et qui ne
seraient qu’un peu plus puissants que l’homme ; en effet, la croyance en eux
est bien plus générale qu’en une divinité bienveillante. L’idée d’un Créateur
universel et bienveillant ne semble pas avoir surgi dans l’esprit d’homme,
jusqu’à ce qu’il y eût été élevé par une longue tradition de culture. »