Exilé depuis 1981, le photojournaliste né
en Iran Reza Deghati n’a pas d’autre choix que de suivre les
manifestations qui secouent son pays depuis l’extérieur. Près de 40 ans
plus tard, très critique du régime des mollahs, il reste toujours prompt
à dénoncer les agissements de la République islamique.
Pourquoi trouvez-vous que les récentes manifestations sont particulières en Iran ?
Quelques mois après le début de la république islamique en
1979, les manifestations contre la République ont commencé. Depuis,
elles ont toujours existé. Les femmes ont commencé à manifester parce qu’elles ne voulaient pas accepter le voile obligatoire,
mais chaque fois le régime a envoyé toute sa force en tirant sur les
manifestants, en tuant des milliers de gens et en arrêtant des dizaines
de milliers d’autres. Ils n’avaient pas peur de le dire. Ils voulaient
que cela fasse peur.
Son interview vaut mills interventions des antisionistes et
antisémites de ce site ! Lors des manifestations de novembre, Qassem
Soleimani était à la tête de
milices de gardiens qui attaquaient les manifestants. Ils ont tué 1500
selon leurs propres dires. Ils font la même chose avec les manifestants
irakiens, qui sont anti-République islamique et régime pro-iranien.
Cette histoire se poursuit donc, mais dans les années précédentes il
fallait attendre un ou deux ans entre les manifestations, alors que
c’est désormais continuel.
Est-ce que les Américains comme Donald Trump ont raison de croire à une chute du régime iranien ?
Le régime n’a plus les pieds solides, il manque énormément de finances à cause des sanctions américaines et européennes.
Cet argent, en partie, n’était pas pour le peuple iranien, mais pour
les forces militaires, les gardiens de la révolution, la police et
eux-mêmes. Une grande partie est envoyée au Liban pour le Hezbollah, au
Yémen et dans d’autres groupes de milices que l’Iran a formés en Irak en
Syrie, en Afghanistan. À partir du moment où ils ont perdu cet argent,
ils commencent à ne pas payer les ouvriers ou les fonctionnaires des
administrations. Il y a donc de nombreux signes d’un effondrement.
Autre exemple, le régime avait autour de lui un bon groupe
d’artistes, des acteurs, des célébrités. Beaucoup de ces gens avaient
des millions de followers sur les réseaux sociaux, donc ils s’en
servaient beaucoup. Ils utilisaient la peur, ou d’autres moyens pour les
attirer. Mais depuis quelques jours, un par un, ils commencent à se
désister et à s’excuser sur les réseaux sociaux. Je pense que l’on est
proche d’une fin de régime.