• AgoraVox sur Twitter
  • RSS
  • Agoravox TV
  • Agoravox Mobile


Commentaire de Vivre est un village

sur Vers la « coronarécession »…


Voir l'intégralité des commentaires de cet article

Vivre est un village Vivre est un village 17 mars 2020 09:39

@Mélusine ou la Robe de Saphir.
La pensée d’Hannah Arendt est, devrait être, plus que jamais, à l’ordre du jour !!!

La vita activa et l’âge moderne

Si l’étude systématique du travail, de l’œuvre et de l’action a permis de voir leur signification politique, en situant chacune de ces activités entre le domaine privé et le domaine public, l’étude historique vise désormais à répondre à la question initiale d’Hannah Arendt : comprendre ce que nous sommes en train de faire, en quoi la modernité a pour effet l’aliénation du monde. Cette étude historique s’appuie sur la description de deux processus.

Le premier processus décrit par Hannah Arendt est le progrès scientifique, et en particulier l’invention du télescope. Cette invention a eu pour effet de permettre à l’homme d’avoir un point d’Archimède32 pour observer la Terre de l’extérieur. Les développements de la philosophie, et en particulier le cogito comme réponse au doute cartésien, ne sont que le prolongement de cette aliénation du monde. Aucune vérité ne subsiste, et c’est donc la vita contemplativa elle-même qui disparaît, c’est-à-dire que la pensée n’est plus perçue comme une manière d’atteindre l’éternité :

« le philosophe ne se détourne plus du monde périssable des illusions pour pénétrer dans le monde des vérités éternelles, il se détourne de l’un comme de l’autre, et se retire en soi-même. »33

Le deuxième processus décrit, qui est en fait antérieur, est l’apparition du christianisme et d’une nouvelle espérance : l’annonce de l’immortalité de la vie individuelle. C’est alors la quête d’immortalité en ce monde, l’espoir de laisser une trace de ses actes aux générations futures, qui devient futile : la hiérarchie de la vita activa est renversée, le cycle vital du travail prenant la première place auparavant attribuée à l’action. La sécularisation, et donc la remise en cause des certitudes énoncées par le christianisme n’a fait que radicaliser cette dynamique déjà lancée : l’immortalité accessible n’est plus celle de la vie individuelle mais uniquement celle de l’espèce, celle du processus vital.

Les deux processus historiques décrits ont eu pour effet la disparition de l’espérance de l’éternité et de celle de l’immortalité pour ne plus laisser la place qu’au cycle vital. Dès lors, il n’y a plus aucune raison d’agir dans le monde, de prendre des initiatives :

« On peut parfaitement concevoir que l’époque moderne - qui commença par une explosion d’activité humaine si neuve, si riche de promesses - s’achève dans la passivité la plus inerte, la plus stérile que l’Histoire ait jamais connue. »34

La tendance à l’inertie, la disparition progressive de toute action, voilà « ce que nous sommes en train de faire ». C’est donc l’avenir même de l’homme qui est en jeu et qui suppose chercher à sauver de l’oubli la quête d’immortalité.

Hannah Arendt clôt son livre en suggérant qu’outre l’œuvre et l’action, la pensée pourrait elle aussi avoir un rôle quant à cette quête d’immortalité. Cette question sera l’objet de son livre inachevé, La Vie de l’esprit.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Condition_de_l%27homme_moderne


Voir ce commentaire dans son contexte





Palmarès