@Mélusine ou la Robe de Saphir.
Marc MORTUREUX
Directeur général de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de
l’environnement et du travail (Anses)
Face au constat de la diminution de la diversité naturelle des organismes vivants, une forte
mobilisation s’est mise en place, au niveau international, pour préserver et restaurer la
biodiversité. Le Sommet de la terre à Rio en 1992 et conférence mondiale de Nagoya en 2010 en
sont deux jalons majeurs. En France, c’est un sujet d’actualité, avec le projet de loi relatif à la
biodiversité mais aussi le développement de l’agroécologie porté par le ministère de l’Agriculture,
actuellement en discussion au parlement.
L’Anses ne travaille pas directement sur la biodiversité et ne mène pas de projets de recherche en
génétique animale et végétale. Mais nous sommes bien entendu attentifs aux conséquences de la
réduction de la biodiversité, qui peut être un facteur de risque d’émergence et de dissémination
de maladie ou de ravageur sur un territoire, avec des conséquences sur la qualité sanitaire des
cultures et des animaux, et donc sur la qualité de nos ressources alimentaires. La perte de
biodiversité par homogénéisation du profil génétique des animaux ou des végétaux peut
constituer un risque de dissémination des maladies au sein d’une filière par la sélection d’une
majorité d’espèces sensibles à la même maladie.
Deux exemples, très concrets et sur lesquels nos équipes travaillent. Dans la filière volaille,
200 000 poules pondeuses peuvent être produites pour une seule poule pedigree. C’est pourquoi,
quand un micro-organisme se répand au sein de la filière, il peut infecter un part importante de la
production mondiale de volailles en seulement quelques mois, comme ce fut le cas avec
Salmonella enteritidis dans les années 1980. Par ailleurs, la culture de la banane est désormais
homogénéisée autour d’une variété unique dite Cavendish. Dans ces conditions, lorsque la
Fusariose s’attaque comme aujourd’hui à cette variété précise, toute la production mondiale s’en
trouve menacée.
Autre illustration, celui de l’évaluation des pesticides qui est du ressort de l’Anses. Le quotidien Le
Monde fait état, en première page de son édition du jour, d’une étude scientifique dénonçant le
rôle de certains pesticides dans l’hécatombe, non seulement des abeilles, mais plus globalement
chez les insectes. Nos évaluations intègrent les effets potentiels de ces produits sur différents
organismes vivants de la faune et la flore et peuvent mener à des mesures d’interdiction ou de
restriction d’usage. Mais c’est un sujet d’une grande complexité et il est clair que, dans le cadre
de nombreux travaux européens en cours, nous aurons encore à faire progresser les lignes
directrices applicables à l’évaluation de l’impact de ces produits sur la biodiversité, à court et à
long terme, en prenant en compte l’avancée des connaissances scientifiques.
https://www.anses.fr/fr/system/files/Anses_14_Actes_Colloque_perte_biodiv_SP .pdf