Mardi 15 septembre 2020 :
Marseille et les Bouches-du-Rhône :
Coronavirus :
les services de réanimation au bord de la saturation dans les
hôpitaux de la région.
Finis les euphémismes visant à
rassurer la population : hier, le Directeur général de l’Agence
régionale de santé (ARS) Philippe De Mester n’a pas mâché ses
mots : la situation sanitaire de Marseille et des Bouches-du-Rhône
est « particulièrement préoccupante » a-t-il alerté,
citant à l’appui des indicateurs qui se dégradent de jour en jour.
Désormais, plus de 10 % des
Marseillais qui se font tester sont positifs (10,6 %). Dans la cité
phocéenne, le taux d’incidence atteint le record de 312 nouveaux cas
pour 100 000 habitants, il flambe à 400 chez les 20-40 ans. "Et
les jeunes ne sont pas les seuls touchés. Ce que nous redoutions
s’est produit : des populations plus âgées, plus fragiles sont
désormais contaminées."
Résultat logique : "Depuis 10
jours, nous constatons une hausse rapide des hospitalisations et des
admissions en réanimation qui nous inquiète énormément", a
insisté Philippe De Mester. Les "très fortes tensions sur les
réanimations« s’intensifient : »Nous sommes passés à un
doublement des entrées tous les 12 jours, à moins de 8 jours
maintenant, avec un risque rapide de saturation". Hier, avec 139
patients placés en réanimation en Paca, il ne restait que 64 places
disponibles pour les malades Covid.
À l’Assistance Publique – Hôpitaux
de Marseille, la situation est plus difficile encore : 129 lits Covid
étaient occupés hier et 29 encore vacants. En réanimation, 31 lits
étaient pris sur 35...
"À la différence de la vague du
printemps, nous devons désormais gérer de front deux flux de
patients : les malades Covid et tous les autres, qui sont très
nombreux. Nos services sont occupés entre 80 et 90 %", a
(ré)expliqué le directeur général du CHU Jean-Olivier Arnaud. Et
pour « vider » les hôpitaux, pas question de procéder comme
en mars-avril à une déprogrammation massive des interventions. Les
retards de soins que le confinement a entraînés au printemps
seraient trop préjudiciables en termes de santé publique.
Pourtant, le manque de lits et de
personnel va obliger le CHU à annuler certaines activités, "avec
prudence, au jour le jour", en déterminant des ordres de
priorité pour les patients, en fonction de l’urgence. Ces jours-ci,
des salles de blocs de l’hôpital Nord vont être fermées pour
récupérer des infirmières qui seront redép loyées en
réanimation. Par ailleurs, 25 lits supplémentaires vont être
ouverts à La Conception, pour soulager l’IHU.
"Le personnel est notre
préoccupation majeure. Nous avons réalisé une centaine de
recrutement depuis la fin de l’été" a indiqué Jean-Olivier
Arnaud. Mais le directeur du CHU a été très clair : "Nous
n’aurons pas la même réserve d’effectifs qu’au printemps."
Le Pr Laurent Papazian est chef du
service de réanimation de l’hôpital Nord et coordinateur du
dispositif de réanimation pour les Bouches-du-Rhône.
La Provence : Quelle est la
situation des réanimations ?
Laurent Papazian : Aujourd’hui,
dans les Bouches-du-Rhône, un tiers des lits de réanimation sont
occupés par des malades Covid, soit une centaine sur 300. Entre les
entrées et les sorties, il y a chaque jour cinq ou six malades en
plus. Au printemps, la hausse avait été plus rapide, mais cela
s’est arrêté avec le confinement. Là, on sait qu’il va falloir
s’inscrire dans la durée. On ne sait pas jusqu’à quand... À ce
jour, il n’est pas exclu d’armer un TGV pour envoyer des malades dans
d’autres régions. Une cellule centrale du ministère pourrait
prochainement être chargée de cette question.
La Provence : Avant cela, il est
prévu d’augmenter les capacités localement ?
Laurent Papazian : Oui, mais cela
ne sera pas possible si l’on continue toutes les autres activités
chirurgicales. Nous nous apprêtons donc à diminuer la voilure, sans
déprogrammer totalement comme au printemps. Le gros problème, c’est
le personnel. L’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille a embauché
cet été, notamment des infirmières, mais nous manquons de
candidats. Une bonne partie des nouvelles promotions est déjà
partie en libéral.
Souhaitiez-vous des mesures plus
strictes que celles annoncées par le préfet ?
Laurent Papazian : Ce qui est
inquiétant, c’est que le robinet viral continuer de couler à flots.
Je souhaiterais déjà que les mesures précédentes soient
respectées, et pas uniquement par les jeunes. Il faut qu’à
Marseille, les gens comprennent l’importance du port du masque. Quand
je vois les images de dimanche soir sur le Vieux-Port, je suis
content que l’OM ait gagné bien sûr, mais cela me fait froid dans
le dos...
https://www.laprovence.com/article/papier/6109931/les-reanimations-au-bord-de-la-saturation.html