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Commentaire de Christophe Claudel

sur Zemmour Président : l'esprit du taon


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Christophe Claudel Christophe Claudel 14 février 2021 20:43

@McGurk : "Je ne suis pas sûr que vous ayez conscience du problème religieux dont vous parlez. Il n’est pas qu’un concept mais une réalité. Pourtant, on a eu soixante ans pour l’analyser, le traiter et passer à autre chose. "

Vous confondez comme beaucoup de personnes qui donnent de mauvaises réponses à un vrai problème le « religieux » et le spirituel".

La France qui est le pays le plus rationaliste au monde devant la Corée du Nord crève littéralement de son mépris et de son ignorance du spirituel. A une époque où le paradigme rationnel dont elle fut l’un des berceaux est en crise majeure et en passe d’être englobé par un autre beaucoup plus vaste.

Mais par « spirituel » il ne faut surtout pas entendre le « religieux », ni même « spiritualité ». Le spirituel est ce qui relève de l’esprit, de la conscience. Ici la Conscience collective. Et même globale, à l’heure où la conscience de « l’humanité » émerge en tant que conscience autonome unifiée. La spiritualité c’est l’ensemble des croyances et pratiques qu’on partage à propos du monde de l’esprit (opposé à la matière). Et la religion c’est une spiritualité fondée sur des croyances, des représentations, une tradition faite de dogme, de rites, une morale ou une idéologie qui relient à une Transcendance. Ou à l’Immanence dans le cas des sagesses orientales ou des religions primitives.

Aujourd’hui la spiritualité en France, pays non seulement le plus rationaliste mais aussi le plus individualiste au monde, est une affaire strictement individuelle. Même si elle se pratique pour certains – Juifs, chrétiens, musulmans notamment, au sein de communautés solidaires ou d’assemblées régulières. Dans nos sociétés postmodernes, la spiritualité est même devenue l’inverse de ce qu’elle est supposée être : un accessoire dans la panoplie des techniques de développement personnel au service du confort corporel, psychique et moral. Et donc de l’ego narcissique et autosuffisant. Un produit à consommer entre un cours de taichi et une séance de massage aux pierres chaudes, comme les baies de goji, les bâtons d’encens et les musiques de relaxation.

Qu’on soit clair : j’ai été 15 ans prof de taichi et 20 ans coach holistique : je connais donc parfaitement ce marché à gogos.

Mais ce n’est pas avec ces recettes new age qu’on parviendra à élever la conscience d’un groupe, d’une nation, a fortiori de l’humanité, vers une prise de conscience collective et une participation active à une même entité qui nous dépasse.

Les religions traditionnelles sont impuissantes à permettre ce "saut quantique" de la conscience humaine. Car elles appartiennent à un paradigme révolu : celui des mythes, que la rationalité prétend avoir évacué en en inventant d’autres, de type scientistes. Les idéologies sont en effet à la raison ce que les religions sont à l’esprit : des mythes rationalistes. Or elles ont clairement prouvé leur faillite à précipiter le Bonheur pour tous.

Reste l’Eveil collectif, au seuil duquel nous hésitons mi-incrédules mi-terrifiés. Entre deux écueils : la régression identitaire et fondamentaliste (dont Marion Maréchal, comme Tariq Ramadan ou les gourous évangéliques de Trump, sont des illustrations équivalentes) ; et fuite en avant dans le nihilisme autodestructeur ou la plongée dans la paranoïa transhumaniste, qui représente l’ultime avatar du rationalisme et du positivisme scientistes sur fond de fétichisation de la technologie, au service d’une élite de « dieux » autoproclamés.

On est loin de Zemmour : un simple nostalgique complexé bloqué au paradigme politique, culturel et civilisationnel. Or le paradigme nouveau n’est ni militaire, ni politique, ni économique, ni scientifique, ni éthique, ni culturel, ni civilisationnel. Il est conscientiel (spirituel), quantique (pleine conscience totalement unifiée et intriquée), avec une pensée post-rationnelle, non dualiste, non formelle, acausale, non verbale. « Centaurique » comme le dit le philosophe américain Ken Wilber.

Il faut cesser de vouloir échapper à l’angoisse d’exister en se soumettant à des dieux, à ceux qui se prétendent tels, à des discours ou des idéaux fabriqués par d’autres, à attendre des messies, des sauveurs ou E.T. Et apprendre enfin à penser et vivre comme des dieux. C’est-à-dire détachés des déterminismes de notre « incarnation » auxquels nous avons remis tous pouvoirs. Délivrés de notre identification à la matière physique, qui n’a aucune réelle existence et n’est qu’un vaste champ holographique d’expérience. Et donc réaliser pleinement notre part « divine », créatrice sans limites, toute puissante/ Mais sans volonté de puissance, sans nous crisper sur l’ego qui nous fait craindre de « mourir » et de perdre en nous enfermant dans le mimétisme. Et sans angélisme ou fuite désincarnée. Vivre totalement cette condition passagère d’humains, sans nous identifier à cette dimension.

Vaste programme qui va bien au-delà d’un simple projet politique pour la France ou pas la France. Mais qu’aucun ne pourra demain ignorer, à moins de conduire ceux qui l’écoutent vers l’impossible retour à ce vieux monde déjà mort. 


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