En 1992, Bertrand Tavernier signait L.627, polar ultra-réaliste sur la brigade des stups. Tavernier filmait la réalité du terrain, les « moyens » dont disposaient les flics, leur isolement, leur image. Un film-choc et fort.
En 2004, Olivier Marchal réalisait l’un des meilleurs polars français depuis ceux de Melville, 36, quai des Orfèvres, l’affrontement de deux flics de haut rang, sur fond de chasse à l’homme. Là aussi, l’ultra-réalisme du film en fit une grande œuvre cinématographique.
Xavier Beauvois vient de réaliser avec Le Petit Lieutenant un film qui s’inscrit, dans son traitement et son propos, dans la lignée des deux précédents. Car la « guerre » des services existe toujours bel et bien, car aussi la dureté du milieu de flic ne doit pas être idéalisée ou déformée comme dans un épisode de Julie Lescaut ou Navarro. Le cinéaste a choisi de suivre le parcours d’une brigade de la crim’ et le parcours d’une jeune recrue.
Antoine sort tout juste de l’école de police et intègre la brigade de Caroline Vaudieu, figure de la crim’ qui revient après avoir passer quelques temps loin du terrain pour vaincre son alcoolisme. Il va apprendre la réalité du terrain, les hommes, les galères, le côté sombre du travail. Vaudieu se prend d’amitié pour le jeune homme qui a le même âge qu’aurait eu son propre fils, décédé des années plus tôt d’une méningite. De son côté, Antoine découvre Paris et ses crimes, mais pense aussi à sa femme laissée au Havre.
Dès le début du film, Beauvois nous plonge dans le milieu de la police avec la cérémonie marquant la fin de l’apprentissage théorique et le début d’une nouvelle vie avec le choix de l’affectation. Une cérémonie très empruntée où les jeunes de tous milieux quittent définitivement leur monde pour entrer dans celui de la police.
Le cinéaste n’essaye pas de dramatiser ou d’embellir plus que de raison le milieu où évoluent ses personnages, il les filme avec leurs défauts (racisme, alcoolisme...) et leurs qualités (engagement, dévouement, esprit d’équipe...). On peut lire sur leur visage la lassitude qu’ils ressentent parfois face à la violence des hommes, des situations auxquelles ils sont confrontés. Pourtant, ils encaissent les coups et avancent de plus belle, quels que soient les obstacles.
Beauvois saisit ces moments de la vie d’une unité, d’une équipe, entre la fraternisation et la distance, entre ces hommes et ces femmes parfois différents mais devant être unis pour réussir. Avec un style très brut, caméra à l’épaule, il les suit dans leur enquête criminelle. Le Petit Lieutenant raconte aussi l’histoire d’un jeune homme, autant fasciné par le métier que par l’image qu’il en a, celle des films. Pourtant, la réalité est bien plus dure et bien plus crue.
Le réalisateur n’essaye pas de nous épater mais il réussit à aller au plus près de ces flics, sans les juger mais simplement saisir la réalité de leur vie.
Sans esthétisme, avec des images froides, caméra à l’épaule, Le Petit Lieutenant est un film qui se veut avant tout un témoignage d’un métier, d’un milieu que l’on ne voit finalement jamais sous son vrai jour au cinéma.
En cela, Le Petit Lieutenant est réussi.
Beauvois s’est entouré d’un casting solide, faisant une nouvelle fois preuve de discernement dans ses choix de comédiens. Jalil Lespert incarne Antoine, le petit lieutenant qui va découvrir la réalité du métier, avec encore une fois une étonnante facilité. Il a su se fondre dans la peau de son personnage avec beaucoup de talent, sans jamais sombrer dans la caricature. Une qualité que l’on peut aussi noter chez ses camarades de jeu, Nathalie Baye, émouvante dans le rôle de Vaudieu (personnage d’abord écrit pour un homme), fragile et forte à la fois, un antagonisme qu’elle porte en elle tout le long du film ; Roschy Zem, comme toujours impeccable ; Xavier Beauvois lui-même, plus en retrait, Jacques Perrin pour un rôle secondaire mais non moins important dans l’intrigue.
Le Petit Lieutenant est un film à voir, pour ses comédiens, son histoire et sa grande qualité. Beauvois fait preuve d’une belle maîtrise d’un sujet pourtant maintes fois porté à l’écran avec plus ou moins de succès. On pourra classer son film dans la catégorie des réussites.
Charliek
28/12 11:18 - Sandra.M
A l’image de ce petit lieutenant (Jalil Lespert) lorsqu’il entre à la 2ème division (...)
04/12 20:21 - Charliek
En 1992, Bertrand Tavernier signait L.627, polar ultra-réaliste sur la brigade des stups. (...)
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