@velosolex
Le soleil a une importance extrême dans ce roman, comme le titre l’indique. le soleil a été divinisé très tôt par nos ancêtres. Les panneaux photo voltaïques maintenant en dépendent, et bien sûr nous mêmes.
Klara a tellement compris cette dépendance, de façon subtile, avec cette intelligence échappant déjà peut être à ses concepteurs, ne voyant dans ces robots qu’une aide pratique, qu’elle possède déjà sûrement à ce niveau une avance, une capacité à voir, au delà du rationnel, dans ce qu’on peut nommer « le sacré » et qui fait d’elle « une voyante » ayant ce « Shining » que Stephen King avait évoqué, dans le roman du même nom, pour baptiser les capacités divinatoires et shamaniques d’un enfant. .
Ces questions, sur l’âme, en résonance avec le fait d’accepter l’autre, comme humain, ou non, les conquistadors espagnols se les ont posées ; Il s’agissait de savoir si les indiens du nouveau monde étaient des sujets de dieu !
Être diaphane, étrange, fragile et forte, que certains trouvent « mignonnes », et d’autres simplement « une machine » Klara avance sur son chemin de prédestination.
La voilà dévolue au service d’une fillette, fleur maladive et sensible, tombée en amitié avec elle. Et c’est un étrange conte, que cette nouvelle « Klara au pays des merveilles et des douleurs », comme on pourrait l’appeler. Les humains autour d’elle ont beau faire, cette humanoïde perce leur carapace d’insensibilité et de mise à l’écart qu’ils devraient observer face à un robot.
Et ceci s’en faire le moindre impair, comme une geisha parfaite, osant parfois tout de même s’affranchir dans les marges de son cahier de charges, dans son souci du devoir et de la recherche de la qualité !
C’est un mantra obsessionnel chez Ishiguro, déjà présent dans l’ensemble de son oeuvre. Dans son expression « l’enfer c’est les autres », Sartre nous disait qu’en fait c’était l’opinion des autres qui nous structurait. Et que nous sommes en symbiose et en dépendance avec ces retours. Les messages émotionnels et dialectiques que nous envoyant font évoluer le monde qui nous entoure, et celui ci joue autant sur nous.
Klara joue finalement un rôle de thérapeute, toujours disponible, apaisante, tentant de ramener les autres à leur devoir, aux urgences de l’heure, mais elle n’intervient pas de façon personnelle, hésitant toutefois parfois sur la part d’initiative personnelle qu’elle est obligée de prendre, se freinant ou préférant se taire quand elle est dans le doute.
On sent alors qu’elle a mûri et qu’elle est capable de développer son intelligence formelle dans des territoires qu’elle ne voyait jusqu’alors que de façon naïve, car ne les ayant pas exploré, comme les prairies immenses autour de la maison, où se tient une grange où le soleil semble s’abîmer le soir. Et ce, grâce à sa curiosité, mais aussi à la nécessité, attachée qu’elle est aux sentiments, à l’émotivité et à l’empathie, ce monde des neurones miroirs.
Klara aura réussi cet exploit, en apprenant non plus à reproduire, ni même à synthétiser, et à accroître son potentiel intellectuel pur, mais à comprendre le coeur de l’humain, et au delà de ça, à l’incorporer elle même. C’est là sans doute que se trouve la vraie intelligence qui nous relie les uns aux autres.