En effet : et si, plutôt qu’un « accident », Outreau était surtout l’illustration d’une évolution dangereuse ?
D’abord, on ne peut pas sérieusement prétendre que la magistrature est imperméable à l’évolution des pouvoirs et des rapports des forces sociaux. Quel milieu professionnel pourrait l’être ?
Ensuite, le monde politique dispose de nombreux moyens de lui adresser des signaux forts. Pas seulement par des discours, mais par des lois, des décrets... qui indiquent clairement dans quel sens les choses doivent évoluer.
Enfin, les juges de l’affaire d’Outreau invoquent pour se justifier l’influence des médias, mais à qui appartiennent les radios, chaînes de TV, journaux... ?
Lorsqu’une loi de 2001 a autorisé la Cour de Cassation, à compter du 1er janvier 2002, à déclarer des pourvois irrecevables sans avoir à motiver une telle décision, c’était un signal fort de donné aux Cours d’Appel. Il allait devenir de plus en plus difficile d’obtenir le désaveu d’un arrêt de cour d’appel. La même logique devait forcément se répercuter dans les relations entre les cours d’appel et les tribunaux de première instance. Peut-on vraiement prétendre qu’elle n’a joué aucun rôle dans l’affaire d’Outreau ?
Mais dans ce cas, le véritable problème réside dans un système social qui incite au développement de méthodes de plus en plus expéditives au sein de la justice, au détriment de ceux qui disposent de moins de moyens pour se défendre.