Certes, il n’y a aucun casque aligné en rangs dans nos larges avenues, aucun Tonton Macoute ravageant les dissidents, aucun Khmers rouges qui n’abattent que les intellectuels et les citoyens des villes pour mourir par millions sur les routes jonchées de crânes. Les principaux atouts de notre nouveau fascisme est qu’il parle doucement. Il ne se présente pas de manière aussi évidente que ceux qui subsistent les dogmes que notre grandeur peut pointer et dire là, ça y est, je le vois.
Ce nouveau fascisme n’est pas alimenté uniquement par des mensonges, même si bien sûr les mensonges sont là en abondances et absurdes. Ce nouveau fascisme est alimenté par les mythes, nos mythes, les mythes que nous absorbons nous-mêmes pour dormir. Ce nouveau fascisme est en vérité un fascisme élémentaire, qui renaît aujourd’hui par une confluence d’événements ; le zèle des rares, en combinaison avec la passivité du plus grand nombre, ont donné un signal à ce nouvel ordre.
L’écrivain Umberto Eco, dans un essai de 1995 intitulé « votre-fascisme, » délimitait plusieurs éléments de base qui ont existé sous une forme ou une autre dans chaque État fasciste dans l’histoire : « la démocratie parlementaire est par définition pourrie, parce qu’elle ne représente pas la voix du peuple, qui est celle du chef sublime. Doctrine dépassant la raison et la science est toujours suspect. L’identité nationale est assurée par les ennemis de la nation. Argument équivalent à trahison. Perpétuellement en guerre, l’État doit gouverner avec les instruments de la peur. Les citoyens n’agissent pas ; ils jouent le rôle de soutien du « peuple » dans le grand opéra qui est l’État".