https://reseauinternational.net/poutine-aux-ennemis-de-la-russie-en-approche/
par Dmitry Orlov
Un bon moyen de déterminer si vous êtes toujours en vie est de vous
demander si vous pouvez encore ressentir de l’émerveillement et de
l’étonnement en observant les changements qui balaient le monde. La
plupart de ces changements sont graduels et difficiles à détecter dans
le cadre de votre expérience quotidienne. Il est donc utile qu’une
personne importante se tienne devant vous pendant une heure, comme l’a
fait Poutine aujourd’hui devant l’Assemblée fédérale de Russie, et vous
explique exactement ce qui s’est passé et ce qui va se passer.
C’est également très divertissant : Poutine est quelqu’un de
naturellement irrépressible qui refuse de se retenir. Son russe a
également une gamme dynamique énorme : à un moment, il ressemble à un
gamin des rues de Leningrad, et à un autre moment, il a l’air d’un
avocat et d’un technocrate accompli, d’un érudit littéraire ou même d’un
étudiant en théologie. Eh bien, il est tout cela à la fois. Qu’on
l’aime ou qu’on le déteste (rares sont ceux qui parviennent à rester
neutres à son égard), il est difficile de l’ignorer. D’autant plus que,
comme à l’accoutumée, son discours annuel devant l’Assemblée fédérale ne
manquait pas de ce que les linguistes appellent des performantifs – des
déclarations qui n’expriment pas une opinion ou ne transmettent pas
d’informations mais transforment la réalité de manière spécifique. Et il
est important de les connaître, surtout si vous résidez dans l’un des
pays dont les dirigeants ont (très bêtement) décidé d’être les ennemis
de la Russie, car, en fin de compte, c’est votre cul qui est en jeu.
Vous pouvez être en admiration devant l’impressionnant dirigeant qui
s’appelle Vladimir Poutine (rien ne vous en empêche) mais, plus
précisément, je pense qu’il est de mon devoir humanitaire de vous
avertir de ce qui risque de se passer avant que quelqu’un ne crie « En approche ! ».
De cette façon, vous pourrez formuler un meilleur plan que de vous
couvrir d’un drap blanc et de ramper lentement vers le cimetière (afin
de ne pas provoquer une ruée dans laquelle quelqu’un pourrait être
piétiné).