De la mélancolie du schizophrène. : Abraham en concluait que « si des états pathologiques aussi différents peuvent procéder de l’étape sadique-anale, celle-ci doit comporter des oppositions internes que nous n’avons pas su différencier jusqu’alors » (ibid., p. 258-259). Il condensera cette hypothèse dans un schéma où il met en rapport ces phases de l’organisation de la libido avec des phases du développement de l’amour objectal, en distinguant pour chaque étape – orale, anale et génitale – une subdivision en deux phases (ibid., p. 309). En ce qui concerne l’analité, il différencie deux phases : une première phase sadique-anale précoce, dominée par les motions destructrices et les visées défensives d’incorporation. Cette phase, à laquelle régresse le mélancolique, est marquée par un « cannibalisme total sur la base d’un narcissisme illimité » (ibid., p. 303). Une deuxième phase sadique anale tardive. Cette phase, à laquelle régresse et se stabilise le névrosé obsessionnel, est marquée par un cannibalisme partiel, « qui porte les traces encore claires de son origine, le cannibalisme total, mais en diffère de façon décisive par l’apparition des égards pour l’objet » (ibid., p. 303). Cette deuxième phase, caractérisée par la rétention et la conservation de l’objet, vise la possession d’une partie de l’objet – ce qui implique la conservation relative de l’objet total. C’est dans la transformation de la première à la deuxième phase que s’établirait la différence première – sujet/objet, moi/non moi, dedans/dehors, mère des autres différences, celle des sexes et des générations [5][5]« À cette étape (deuxième phase, tardive, de l’organisation…. Le passage de la phase précoce à la phase tardive de l’organisation prégénitale sadique-anale de la libido s’accomplit, comme nous le verrons plus loin, sous l’effet de la dynamique du double retournement pulsionnel concomitante de la transformation du couple incorporation-excorporation (destructeur de l’objet) en couple introjection-projection (conservateur de l’objet).