Dans "Les
jeux et les hommes" (sous-titré Le masque et le vertige),
Roger Caillois explique que les jeux sont fondamentaux dans le
développement d’une société et que de nombreux comportements
sociaux découlent des rapports d’un individu aux jeux, et non pas
le contraire, comme les petits chats ou les petits lions apprennent à
chasser en jouant.
Les montagnes russes trouvent leur
place parmi d’autres dans sa théorie, et elles seraient classées
dans la catégorie « illinx » dont le but est de provoquer
des vertiges.
Normalement, le
jeu et la réalité sont des mondes bien distincts, chacun obéissant
à ses règles.
Une
personne n’est soumise aux règles d’un jeu que le temps d’une
partie et le joueur retourne au réel qui répond à ses propres
règles quand la partie est terminée. Mais la corruption
des jeux intervient
lorsqu’il y a une contamination, c’est-à-dire lorsque les règles
du jeu s’étendent à la réalité.
Dans
les jeux de la catégorie illinx, la contamination intervient si
l’univers du jeu ne protège plus le joueur du vertige.
Dans
le cas des parcs d’attraction ou des fêtes foraines, la recherche
du vertige est momentanée. Il y a bien une limite dans l’espace et
dans le temps, et le vertige n’est présent que le temps d’un
tour de manège.
Par
contre, quand une personne recherche les effets du vertige en dehors
de l’univers du jeu, il y a une contamination du réel. C’est le
cas notamment de la consommation de drogues et d’alcools qui, si
elles reproduisent des effets de vertige, diminuent jusqu’à les
détruire les capacités physiques et mentales d’une personne.
C’est contre ce vertige-là qu’il faut
lutter. Les montagnes russes ne sont qu’un exutoire faisant partie
des activités humaines « normales », tout comme la
compétition, le hasard et le mimétisme dans les rapports sociaux.