À Jean-Michel BEAU.
1- D’abord je tiens à vous dire l’estime que suscite votre action. Elle
illustre ce qu’on devrait attendre d’un fonctionnaire dans une démocratie :
la Cour d’appel de Paris l’a formulé avec éclat dans son arrêt. Je n’en
crois pas mes yeux, par les temps qui courent. Nul ne saurait faire
prévaloir son obéissance à un représentant de l’autorité de l’État qui est
faillible, sur son devoir de soumission aux principes constitutionnels de
la République.
2- Pour ce qui touche à la protection statutaire du fonctionnaire attaqué
à l’occasion de ses fonctions organisée par l’article 11 de la loi n°
83-634 du 13 juillet 1983, je partage votre indignation. La hiérarchie
administrative viole cette loi le plus souvent. Elle ne l’applique
systématiquement que pour protéger les chefs de service y compris en
position d’agresseurs : ils ont droit, eux, à la prise en charge immédiate
des frais considérables qu’une défense en justice exige, tandis que le
fonctionnaire d’exécution doit les payer de sa poche !
Tous les prétextes sont bons pour justifier cette discrimination illégale,
en particulier l’incertitude du préjudice subi tant que le tribunal ne
s’est pas prononcé. J’ai même vu un recteur d’Aix-Marseille oser dire qu’il
ne pouvait pas accorder la protection statutaire à un professeur puisqu’il
l’accordait au chef d’établissement que celui-ci poursuivait en justice
pour dénigrement à son égard.
Or les textes prévoient que « la collectivité publique est tenue »
d’accorder cette protection statutaire, sans restriction, quitte à ce qu’en
cas de condamnation du fonctionnaire, par « action récursoire » lui soit
demandé de rembourser les dépenses engagées pour sa défense. Comme vous le
soulignez, il semble qu’un fonctionnaire d’autorité condamné échappe à ce
remboursement en général. Du moins, cela reste secret. Nul doute que cette
protection sans faille du chef de service a pour but d’obtenir en échange
une obéissance sans faille « perinde ac cadaver » ! Très cordialement, Paul
VILLACH.