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Commentaire de bodmer

sur Partis politiques en Europe : gauche-droite, nationalisme-globalisation


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bodmer (---.---.34.248) 30 mars 2007 09:37

Voici une analyse qui semble très spécieuse.

Vous essayez, au gré d’une réflexion dont on distingue assez mal les fondements sinon ceux de votre propre opinion, de présenter les partis d’extrême droite sous un angle favorable en fonction d’un critère d’analyse majeur : celui de l’économie. Visiblement, vous êtes contre la mondialisation/globalisation et c’est votre droit, mais vous n’expliquez pas comment l’extrême droite, selon vous finalement à gauche..., pourrait protéger « l’intérêt des populations locales ».

Evidemment, on pourrait décider de fermer toutes les frontières, de taxer très fortement les importations de produits finis et d’empêcher tout individu qui ne soit pas un « local » de venir travailler dans le territoire qui serait dès lors si bien défendu. Pour mémoire, on a déjà connu des formes de protectionnisme de ce type dans les années 1930 qui ont abouti en France sur une crise économique et sociale durable, et qui ont permis en Italie et en Allemagne de faire prospérer les fascismes qui faisaient croire à leur population que l’autarcie allait être réalisée. Si on regarde plus à l’Est, la volonté autarcique, doublée de la planification économique, a permis aux populations ouvrières de vivre dans un confort tel qu’elles ont préféré renverser les régimes qui étaient a priori à leur service après avoir tenté plusieurs fois de se révolter sans succès.

Ne vous déplaise, c’est le libéralisme, c’est-à-dire la liberté d’échanger des produits, des biens, des services, qui permet la croissance économique. Vous ne vous en êtes peut-être pas aperçu - et c’est bien dommage - mais le niveau de vie que nous connaissons actuellement en Europe est bien supérieur à celui qui existait avant la Seconde Guerre mondiale pour ne remonter que jusque là. Vous pouvez être nostalgique des Trente Glorieuses. Pensez tout de même qu’il fallait reconstruire toute l’Europe, ce qui ne pouvait que tirer la croissance (à l’image de la Chine actuellement par exemple qui a un très fort besoin d’équipement car le niveau de vie global de sa population reste très bas). Depuis, la croissance est moins forte en Europe (fin des taux de 5% par an pour « plafonner » bon an mal an autour des 2%), mais elle existe toujours et ceci de manière continue.

Pour revenir sur votre exemple Aubade. Vous regrettez la délocalisation de l’usine. Votre femme serait-elle prête à payer deux fois, trois fois, dix fois le prix d’un sous-vêtement chinois pour lui préférer la marque Aubade ? Faudrait-il délocaliser si les gens achetaient des produits au prix du coût du travail européen ? J’aimerais bien connaître la recette miracle des partis d’extrême droite au service des travailleurs à ce sujet.

Pour suivre sur votre analyse, vous dîtes : « Par contre les partis politiques nationalistes, appelés « d’extrême droite », rejoignent les grands partis de droite quand ils sont favorables à l’augmentation du temps de travail et à d’autres mesures favorables aux entrepreneurs ». On s’y perd un peut : si les entrepreneurs sont les agents du capitalisme mondial et si les partis d’extrême droite sont favorables à des mesures qui profitent aux entrepreneurs, en quoi ces mêmes partis peuvent-ils être favorables aux « intérêts des populations locales », incompatibles selon vous avec la mondialisation ?

Et de parachevez en écrivant : « Un troisième axe, pour représenter une troisième dimension de positionnement des partis politiques, pourrait être ajouté à ce graphe : celui du positionnement selon d’un coté la DÉMOCRATIE (qui défend en priorité la volonté de la majorité des citoyens) et de l’autre l’ANTIDÉMOCRATIE (qui une fois au pouvoir agit selon l’idéologie de son parti ou selon ce que lui dictent les lobbies au lieu d’appliquer scrupuleusement, dans toutes les décisions, la volonté de la majorité des citoyens) ». Voilà une belle leçon de démocrate. Vous expliquez en somme que les partis « traditionnels » de gauche et de droite qui sont élus par la majorité du peuple, peuple qui peut en toute conscience étudier les propositions avant de voter, sanctionner les élus à la fin de leur mandat s’il n’est pas satisfait, participer à la vie politique d’un parti pour faire évoluer les courants de pensée s’il le souhaite, voire fonder son propre parti s’il juge tous les autres inaptes, vous expliquez que ces partis sont antidémocrates car ils n’appliquent pas scrupuleusement la volonté de la majorité des citoyens !? Mais cette volonté, ne s’incarne-t-elle pas dans le vote justement ? J’avoue par ailleurs ne pas comprendre votre conception de la majorité - à moins de considérer que les abstentionnistes sont des citoyens qui prennent leur destin en main en n’usant pas du droit qui leur est donné de déléguer leur souveraineté et ont ensuite raison de contester la politique à longueur de temps. Ou alors faut-il entendre que le peuple est incapable de voter correctement ? En ce cas effectivement, d’autres régimes existent, je ne souhaite à personne leur retour.

Dernier point. Votre analyse économique occulte tous les aspects politiques et sociaux des partis d’extrême-droite. La fermeture des frontières, c’est aussi la xénophobie, plus ou moins mâtinée de racisme selon les partis européens. Le nationalisme n’est pas synonyme de patriotisme. C’en est une version exacerbée qui repose sur des valeurs ethno-culturelles qui conduisent à penser que son pays est meilleur que tous les autres - et souvent menacé par tous les autres - d’où une tendance au repli, à la fermeture et dans le pire des cas à l’agressivité. Le patriotisme, c’est l’amour de la patrie, des valeurs qu’elle porte et c’est une notion ouverte car n’importe qui peut décider d’aimer sa patrie d’origine, ou sa patrie d’adoption. L’identité nationale (sujet d’actualité... ) n’y est donc pas figée mais est à construire et appelle toutes les volontés à participer à son élaboration ne serait-ce qu’en se comportant civiquement.

En conclusion, votre tentative de reclassement des partis politiques semble surtout confirmer que l’extrême-droite (au moins française) est bien un populisme, le miroir aux alouettes de ceux qui ne croyant plus en la parole politique préfère risquer le pire (au moins une grave récession économique en cas d’accession au pouvoir...) en suivant des idées qui, parce qu’elles résonnent fort, semblent sonner juste.


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