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Commentaire de Étienne Chouard

sur Quels sont les blogs politiques les plus influents ?


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Étienne Chouard Étienne Chouard 1er juillet 2006 00:31


Christophe,

Je vous reconnais comme un démocrate et je suis assez admiratif du courage que vous montrez à travers votre blog. Je ne réduis pas du tout votre combat à un commode martyr pour cause conjoncturelle comme on l’a suggéré plus haut : je suis bien placé pour deviner tous les sacrifices que demande un engagement comme le vôtre et ne pas réduire votre aventure aux péripéties qui l’accompagnent.

Et je suis donc surpris par cette antipathie qui transpire de votre message car je ne vois pas ce qui nous oppose.

C’est vrai que vous soutenez ardemment DSK, alors que je ne fais plus du tout confiance à cet homme-là, (comme vous, pourtant, je l’ai admiré), ayant vécu son engagement pour le TCE comme une vraie grave trahison : je ne considère pas le « déficit démocratique » (comme il disent) comme un détail, mais plutôt comme une félonie de la pire espèce, et les politiciens de métier, ceux qui sont précisément favorisés personnellement par ce « déficit démocratique », et qui s’en accommodent fort à propos, devraient nous paraître instantanément très suspects. Bon, mais on peut quand même, entre citoyens non professionnels de la politique, se parler et échanger sans avoir le même jugement sur un politicien de métier, non ?

Est-il possible d’envisager le phénomène des blogs autrement que par le bout politicien de l’affaire ? Sur le fond, avez-vous lu quelques unes de mes réflexions et revendications sur la démocratie ? Et qu’en pensez-vous, point par point ?

Voilà ce qui compte, blog par blog, non ?

Christophe, mes idées rejoignent souvent les vôtres... Comprenez donc mon étonnement. Faut-il être inscrit au même parti que vous (si vous êtes d’un parti) pour être lu par vous sans procès d’intention ? Je pensais que non, j’espère que non.

¤ Sur mon projet d’écrire ensemble une Constitution d’initiative citoyenne :

En faisant référence à mon projet d’écrire cet été UNE Constitution d’initiative citoyenne, (idée peu orthodoxe, j’en conviens, dans le contexte actuel de pensée unique où chacun est invité à toujours plus courber l’échine au profit des rentiers), vous dites, pour vous en moquer : « Ce sera SA constitution. »

Mais vous imaginez bien, Christophe, que l’idée d’écrire LA Constitution ne m’a évidemment jamais même effleuré. Vous me prêtez des intentions que, simplement, je n’ai pas.

Je vous explique : 1) il s’agit pour moi, d’abord, de créer un objet pédagogique qui montrera que mon idée n’est pas une utopie, que les simples citoyens peuvent se réapproprier le processus constituant (pour l’instant confisqué par les professionnels de la politique, évidemment juges et partie, donc malhonnêtes, en la matière).

2) Il s’agit aussi pour moi de donner corps à tous les principes que je défends et auxquels je tiens pour protéger les hommes contre les abus de pouvoir.

Quand on s’attelle à l’écriture des articles, quand on arrête de croire ceux qui nous disent que c’est impossible, on s’aperçoit à la fois que c’est important et que c’est possible.

J’invite donc chacun à essayer, concrètement, réellement (puisque les pouvoirs publics ne nous y incitent pas, on se débrouille tout seul). Est-ce répréhensible ? Je vais même vous avouer que je pensais que vous étiez parmi les mieux placés pour me comprendre et pour m’aider...

Vous semblez pourtant vouloir déconsidérer ma tentative... Pour quelle raison ? Avez-vous quelqu’un à protéger ? Je suis complètement dans l’interrogation car vous me surprenez.

C’est pourtant bien vous qui avez écrit : « La plupart des mairies reproduisent sur Internet leur communication traditionnelle : un message diffusé en sens unique, sans possibilité d’intervention du citoyen infantilisé. », n’est-ce pas ?

Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est-il, pour vous, une réalité à transcrire honnêtement en droit, ou une fiction rhétorique commode pour voiler la réalité d’une domination et distraire les dominés ? Avant de vous lire ici, je croyais connaître votre réponse sans avoir à vous poser la question. Aujourd’hui, je vous la pose.

3) Cette Constitution populaire enfin matérialisée devrait permettre aussi, je l’espère, de comparer sur pièce, point par point, enfin concrètement, une Constitution qui cherche honnêtement à organiser un réel contrôle des pouvoirs, avec une Constitution « ordinaire », c’est-à-dire dans laquelle tous les contrôles sont factices et l’impuissance des citoyens programmée.

Vous voyez bien que je n’écris évidemment pas MA Constitution, projet qui serait effectivement ridicule, mais qui n’est qu’un procès d’intention : ce n’est pas ce que je fais. Est-ce que vous me comprenez ?

Et l’échelle (40 ou 450 millions de citoyens) n’a aucune influence sur la pertinence des rouages protecteurs qui n’a ni âge ni frontières, il me semble : je suis sûr que les Polonais ou les Allemands ont tout autant besoin que nous d’être bien protégés contre les abus de pouvoir, qu’ils soient progressistes ou libéraux, jeunes ou vieux, blanc ou noirs, occidentaux ou orientaux, riches ou pauvres (non, ça c’est discriminant : les riches ont besoin que les abus de pouvoirs, les leurs, soient impunis... précisément, nous y voilà ;o)...

Vous dites qu’une Constitution ne peut passer QUE PAR les élus, (vous dites exactement : « Et c’est impossible, sinon en passant par des relais que sont les élus. Et en acceptant des COMPROMIS. »), alors que je prétends rigoureusement le contraire : elle ne devrait l’être JAMAIS PAR eux, sauf à perdre toute initiative politique citoyenne décisive.

Voilà donc un beau sujet de débat entre nous, sur un point cardinal, et vous avez peut-être raison, je suis prêt à cette éventualité (non déshonorante), je suis sincèrement prêt à l’admettre, pourvu que vous me le démontriez.

C’est bien une vertu centrale de la démocratie de mettre ainsi en lumière les tenants de thèses adverses de façon à bien peser la qualité respective des argumentations, avant de trancher, n’est-ce pas ?

Pourquoi me faites-vous tous ces procès d’intention au lieu de débattre respectueusement sur des sujets aussi importants pour vous que pour moi ? Je ne comprends pas votre hostilité.

¤ Sur l’explication du succès de mon texte au printemps 2005 :

L’explication que vous proposez du succès de mon site est sûrement fondée en partie : je suis sûr que vous avez raison sur certains points (difficulté des sites qualifiés « extrêmes » à communiquer et à convaincre, et utilisation (ce qui n’est pas manipulation, Christophe) d’un débutant naïf mais sincère, et bosseur !, pour relayer des thèses proches, non polluées par le professionnalisme ou l’idéologie bornée).

Mais réduire l’impact de ce texte, et des réflexions et débats qui l’ont suivi pendant des mois !, à une simple manipulation politicienne, c’est, je crois,
• soit n’avoir rien compris à ce qui s’est passé chez les citoyens « de base » en train de comprendre ce qu’est VRAIMENT l’Union européenne, en train de réaliser le fossé caché, abyssal, entre le beau rêve européen proclamé partout et la sordide réalité mue en douce par des multinationales,
• soit être de mauvaise foi, et je ne peux pas croire que ce soit votre cas.

Enfin, la gauche que vous qualifiez fort commodément d’« extrême » n’a rien d’aussi extrême, c’est quelque chose que j’ai découvert cette année : dès qu’on s’occupe vraiment des gens, dès qu’on se met en tête de les protéger réellement contre les plus riches et les plus forts, on est étiqueté « gauchiste », de gauche « radicale », de gauche « extrême »... Ce qui est quand même assez malhonnête et pas très propice au débat : vous n’aimeriez pas converser avec quelqu’un qui vous traiterait de « fasciste » ou de « collaborateur », n’est-ce pas ? Mais ceux-là, qui traitent les gens de « gauchistes » ou de « fascistes », cherchent-ils vraiment à débattre ?

Vous dites que j’ai été manipulé, et vous présentez une construction assez savante de calculs politiciens qui m’échappent complètement, mais pardonnez-moi, vous ne démontrez rien : on en reste, une fois de plus, aux accusations, aux incantations, nullement aux justifications, et pas davantage aux démonstrations.

J’aimerais pourtant vous entendre sur le fond, argument par argument, au lieu de vous en remettre à des constructions évoquées mais jamais détaillées.

Je suis sûr que je pourrais progresser à votre contact, parfois en me rapprochant de vous, parfois en vous montrant qu’il est malin, sur un point, de se rapprocher de moi... Mais pour arriver à ce beau résultat, il faut que nous nous respections, Christophe, je vous le dis sans façon, simplement, humblement, mais je suis sûr de ce que je vous dis là.

Je vous réitère mon admiration pour ce courage dont vous faites preuve contre certains cratocrates. Je ne connais pas tous les détails de vos luttes, mais ce que j’en sais vous vaut ma sympathie smiley

Je regrette d’autant plus vos analyses malveillantes que je vis comme autant d’injustices que j’espère éphémères.

Au plaisir de vous lire, sans aucune rancune smiley

Étienne.


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