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Commentaire de Henri Masson

sur Polémique médiatique autour de l'espéranto


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Henri Masson 8 juillet 2006 10:26

« Encore une fois, il y a une différence entre la société telle qu’elle est et la société telle qu’elle devrait être. »

Très Juste !

Effectivement, au temps des chiffres romains, il ne fallait pas chercher à voir un système qui fonctionnait mieux et qui était accessible à tous !

Au temps où les déplacements ne pouvaient se faire que par voie terrestre ou aquatique, il ne fallait pas chercher à voir si des possibilités de transport par air étaient possibles et envisageables !

D’une certaine façon, si la réaction de ceux qui se moquent de l’utopie est consternante, alors qu’ils sont eux-mêmes usagers de ce que l’humanité doit à des utopistes, elle est aussi amusante. Ce n’est pas avec des gens de cette espèce, qui s’accrochent aux vieux systèmes, que l’humanité progresse. De telles communications sont faites aussi en espéranto à travers le monde. L’anglais n’en a pas le privilège. Les statistiques de l’usage de l’anglais sur Internet montrent d’ailleurs qu’il est passé au-dessous des 50%.

Ceci dit, la version en espéranto de Wikipedia a atteint aujourd’hui le nombre de 50 000 articles et se classe ainsi dans le peloton de tête (en 15ème position) parmi les plus de 200 langues de cette entreprise monumentale. C’est pas mal pour une langue que personne n’a jamais parlée (dixit Bénichou et bien d’autres !) et sur laquelle il a été jeté tant de boue quand ce n’était pas autre chose de plus gras et malodorant !

A propos de l’utopie, Edmond Privat avait écrit, dans « Aventuroj de pioniro » (Aventures de pionnier) :

« (...) Si je regarde maintenant un demi-siècle d’action publique et d’écrits, je constate ce qui suit : durant toute la vie, il fut nécessaire et il est encore nécessaire de lutter contre les préjugés. Des choses que l’on jugeait utopiques sont maintenant devenues des réalités. « Jamais des hommes de divers pays ne se comprendront entre eux avec l’espéranto à cause des différences de prononciation » disaient mes professeurs au lycée. Nos congrès ont prouvé le contraire.

« Jamais les hommes ne voleront dans l’air car c’est une utopie » disaient-ils. Eh bien, je voyage aux congrès par voie aérienne.

« Jamais les femmes ne voteront. C’est une utopie ». Elles votent maintenant presque partout dans le monde.

« Jamais les Polonais ne retrouveront leur propre État. C’est une utopie » écrivaient les journaux quand je plaidais et écrivais pour cette résurrection. En 1918, la Pologne devint un État.

« Jamais les Anglais ne quitteront l’Inde. C’est une utopie » écrivaient les mêmes journaux lorsque je tentais d’expliquer le but de Gandhi. Maintenant, ils rapportent tous les jours sur l’Inde et Nehru.

« Jamais vous ne réussirez à ce que les hommes s’abonnent à l’écoute de la radio. Ils ont déjà des gramophones » disaient les banquiers que je visitais pour fonder Radio-Genève. Maintenant, ils regrettent qu’une société coopérative, pas eux, nous ait procuré l’argent, et le budget atteint des millions, heureusement sans profit privé.(...) Comme tout le monde ne connaît pas Edmond Privat, en voici une présentation : Né à Genève en 1889, Edmond Privat apprit la Langue Internationale à 14 ans. A Boulogne-sur-Mer, en 1905, lors du premier congrès universel d’espéranto, à l’âge de 16 ans seulement, il fit le pari un peu fou d’organiser le second congrès à Genève, en 1906. Il eut en cela la « complicité » d’un camarade de lycée non moins audacieux, Hector Hodler (18 ans !), fils du célèbre peintre impressionniste Ferdinand Hodler. Le succès fut au rendez-vous : 1200 participants d’une trentaine de pays.

Privat devint par la suite professeur d’anglais à l’université de Neuchâtel, docteur en Histoire, journaliste, pionnier du radio-journalisme sur ondes courtes, fondateur de Radio Genève en 1925, militant du mouvement coopératif, citoyen du monde, écrivain. Il rédigea divers ouvrages dont plusieurs en espéranto, notamment une biographie de Gandhi dont il fut un ami, qui parut aussi en français.

Interprète à la Société des Nations (SDN, l’ ancêtre de l’Onu) en 1921 et 1922, Edmond Privat devint le remplaçant du délégué principal de Perse auprès de la même organisation de 1921 à 1927 après en avoir été le conseiller. Auprès de la SDN, il défendit par ailleurs un projet de résolution présenté par onze pays dont huit non européens en faveur de l’enseignement, à tous les enfants du monde, « d’au moins deux langues, leur langue maternelle et un moyen facile pour la communication internationale ».

J’ajouterai que Gandhi et Rabindranath Tagore avaient approuvé l’idée de l’espéranto.


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