La « croissance » ne crée pas d’emplois. L’emploi (population active occupée) augmente uniquement si la production (valeur ajoutée) augmente plus vite que le produit de la productivité par la durée du travail.
En six ans, de 1999 à 2005, la valeur ajoutée a augmenté de 11,7 % en France et l’emploi intérieur de 5,6 %. La croissance de l’emploi est inférieure à celle de la production sur l’ensemble de l’activité nationale, mais cela semble aller dans le sens de la croyance commune selon laquelle « la croissance crée des emplois ».
Une analyse de la réalité économique montre que l’évolution est cependant différente et varie de façon importante selon les années et les secteurs d’activités. Deux éléments essentiels sont en effet oubliés ou occultés : les variations de la productivité du travail et de la durée du travail.
En 2001, l’emploi a augmenté au même rythme que la production (croissance de 1,8 %) pour l’ensemble des secteurs d’activité. Mais en 2004, malgré une croissance de la production de 2,5 %, celle de l’emploi a été nulle (0,05 %). Dans l’industrie en 2004, pour une croissance de 1,7 % l’emploi a diminué de 3 %.
Dans les industries des biens de consommation, une croissance de 18 % correspond à une perte d’emplois de 20 % (en six ans).
L’explication de ces différences tient aux gains de productivité (parfois négatifs) qui varient selon les années et les secteurs économiques.
Une étude d’autres périodes, tenant compte de la durée du travail, est encore plus explicites et montre bien la nature complexe des relations entre la croissance économique, l’évolution de l’emploi et celle du chômage.
( déjà analysé ici Des mythes autour de l’emploi et ici Gains de productivité, durée du travail et chômage )
La création nette d’emploi est le résultat d’une différence positive importante entre la croissance de la production et celle de la productivité ou d’une forte diminution de la durée du travail.
Pour une durée constante du travail, seule une évolution de la valeur ajoutée supérieure à celle de la productivité entraîne une création nette d’emplois (nombre d’emplois créés, à durée du travail identique, supérieur à celui des emplois détruits).
Plus généralement, l’évolution de la valeur ajoutée est égale au produit des évolutions de la productivité, de la durée du travail et de la population active occupée.
Autrement dit, l’emploi (population active occupée) augmente uniquement si la production (valeur ajoutée) augmente plus vite que le produit de la productivité par la durée du travail.
Des gains de productivité supérieurs à l’augmentation de la production détruisent l’emploi si la durée du travail n’est pas réduite en proportion.
Lire La croissance ne crée pas d’emploi
et voir les tableaux statistiques (fichiers xls)
Dans un contexte de limitation des ressources au niveau mondial, en énergie, matières premières, eau ... la croissance de la production ne peut se poursuivre sans fin.
En l’absence de croissance ou dans le cadre d’une décroissance volontaire et raisonnée (qui n’est pas un retour à un plus faible niveau de vie), le nombre d’emplois peut augmenter et le chômage réel peut disparaître.
Cela est possible par une diminution de la durée du travail (sans perte de niveau de vie), une meilleure répartition des richesses, en évitant l’énorme gaspillage dû à la logique financière de l’économie et aux transports inconsidérés, en limitant de la production aux biens et services utiles et nécessaires.
Lire aussi Le Cauchemar de Don Quichotte et d’autres articles sur la décroissance volontaire (avant qu’elle ne soit subie et dramatique).