« Grosse machinerie à pondre du »citoyen« et du »responsable« , l’écologisme d’Etat est en passe de succéder aux droits de l’homme d’hier : outillage utile pour délester l’esprit de ses outils à gratter le dogme. Le désarmement des consciences passe avant tout par le bêlement des mêmes références. L’élève de huit ans a sa fiche-résumé sur l’éco-gestion ou l’éco-compatibilité, quelques chiffres en tête et au moins un acte citoyen pour participer au sauvetage de la planète. Au temps béni des jeux et des rêves, de ces extases narcissiques où l’enfant, par éclair, parvient à saisir la valeur de sa vie (le gamin qui regarde ses jambes courir ne peut pas être nihiliste, c’est une impossibilité pratique) le voilà déjà en train d’ânonner, tel un vieillard sénile, deux ou trois règles de bonnes conduites »citoyennes« ou »écologiques« . Il n’est pas rare (il suffit de poser la question) que le même vieux-jeune soit plus à l’aise sur les plans d’épargne retraites de ses géniteurs que sur l’origine poético-mystique de l’univers, plus prolixe sur le code de la route que sur les déboires culinaires et moraux du corbeau perché. Ces soumis de huit ans dressés au tri des ordures et aux jeux vidéos (à moins que ce ne soit aux jeux vidéos sur le tri des ordures), seront (enfin une occasion d’espérer) éco-compatibles. Lobotomisés par des méthodes pédagogiques téléchargeables en format MP3, les nouveaux minuscules du siècle naissant sontadaptés, connectés, à la page. Et pour eux, la page sera verte. Défense de barbouiller l’immaculée prairie. Le vert, ça se contemple. Le dressage pavlovien attend ses nouveaux psychologues scolaires : le rouge, c’est le sang, c’est pas bien. Le bleu, c’est le ciel, c’est bien. Le vert, c’est la nature, l’écologie, le recyclage, le durable. Le vert, c’est le bleu sans le rouge. »
René Riesel : (l’anti Bové)
« catastrophisme, administration du désastre, et soumission durable »