@Christian, vous m’avez fait rire !
Vous avez raison de dire que je passerais un mauvais quart d’heure en face d’un Tariq Ramadan ou équivalent – surtout quand leur éloquence donne à la barbarie un visage humain- pour la seule raison que leur exploitation de l’ignorance m’inspire tant de colère que j’aurais sans doute du mal à contrôler la température de mon corps. Mais cela ne lui donnerait pas raison pour autant car je ne fonde pas ma conception de l’islam sur ce qui m’arrange mais sur une étude des textes et rien d’autre. Suis-je proche du soufisme ? Je ne peux que l’espérer sauf que je tiens à préciser que le soufisme n’est pas un « islam modéré » mais au contraire un islam « avancé » si j’ose dire. Pour préciser, l’islam n’est en fait qu’une étape dans la religion musulmane qui comporte trois degrés : l’islam (qui consiste à respecter les cinq piliers) doit être suivi de ce qu’on appelle l’imân (la foi),puis de l’Ihsân (l’excellence)… Ces trois degrés sont symboliquement comme les trois couches d’un seul fruit : l’écorce correspond à l’Islam, la pulpe à l’Iman (degré de la foi) et enfin le noyau à l’Ihsan et à la Vérité (Haqiqah ). Mais on ne peut accéder au degré de l’Imân sans passer par celui de l’Islam, ni à celui de l’Ihsân sans celui de l’Imân. Le soufisme, c’est donc une profonde connaissance, un degré de « Vérité » plus élevé, permettant d’atteindre la vertu, la noblesse de caractère. Donc si le dogme de l’islam est là pour définir la doctrine musulmane, il ne suffit pas. Il serait même stérile s’il n’était pas accompagné de l’excellence du comportement et une bonne action accomplie est meilleure pour la foi que des discussions dogmatiques interminables. Et il serait souhaitable que les prédicateurs invitent à ce dépassement plutôt qu’à laisser croire que l’islam est un je ne sais quel appel au meurtre. .
Le soufisme est donc tout le contraire du doute en matière de foi, car il est non seulement connaissance intellectuelle mais aussi une connaissance vécue. Et pour en revenir à votre comparaison avec les jésuites, en effet, si j’étais catholique, je me considérerais sans doute proche des jésuites en ce qu’ils s’approchent de l’idée de libre-arbitre , concept très important dans le Coran :
« Dieu n’impose à chaque âme que ce qu’elle peut porter, elle sera rétribuée selon se qu’elle peut porter, elle sera rétribuée selon ce qu’elle aura accompli et elle sera punie selon le mal qu’elle aura fait. »
Sourate 2. la Vache (Al-Baqarah) Verset 286
Quant à l’idée du Destin (Maktoub), qui serait plus proche de l’idée de « prédestination » chez les jansénistes, elle existe également, mais il s’agit d’une sorte de « prescience » divine, et non d’un déterminisme. Pour illustrer la distinction, c’est comme si un père, par la connaissance qu’il a de son fils, prévoiyait que celui-ci s’adonnerait à la violence. Si ce dernier le fait, ce ne sera pas parce que son père l’y aura contraint, mais sa prévision se confirmera. Par contre, le fils demeure libre de refréner ses passions, de maîtriser son comportement, de cultiver ses bonnes tendances, de donner généreusement etc…