Intéressant, mais à côté de la plaque.
Les Occidentaux n’ont jamais rien compris à la Russie, ils n’ont jamais fait que la fantasmer. Comme vous le faites. Poutine est, pour les Occidentaux, soit le boucher dépeceur de Tchétchènes et assassin de journalistes, soit l’homme qui représente l’alternative à l’hégémonie américaine honnie, celui qui a su rassembler une sorte de bloc des non-alignés. Ces deux caricatures sont totalement éloignées de la réalité.
Ce pseudo-bloc des résistants à l’Empire est une blague. La Chine, devenue une vraie poubelle, livrée entièrement aux affres du capitalisme sauvage qui n’a pour lui que le fait d’être plus ou moins chinois. L’Inde, un cloaque de misère traînant un système politique probablement parmi les plus rétrogrades qui aient jamais existé et hypothéquant définitivement tout développement réel. Le Brésil ? circulez, il n’y a rien à voir que les restes de l’Amazonie, qu’on a laissé saccager pour en faire de la canne à sucre et autres produits de l’agriculture intensive. Il est vrai que dans tous ces pays, il y a un grand potentiel, c’est indéniable. Cependant, il ne sera jamais réalisé sans vision politique.
Poutine n’est que le successeur beaucoup plus habile de Eltsine, rien de plus. Il n’a rien d’un Pierre le Grand ou d’un de Gaulle russe. Sa politique s’est bornée à récupérer les sociétés d’État exportatrices de matières premières et à y installer ses copains, afin d’en récolter les bénéfices au lieu des banques anglo-saxonnes. L’innovation par rapport à l’ère Eltsine, c’est qu’il veille à jeter quelques miettes de cette immense richesse à la populace afin qu’elle se tienne tranquille. Ainsi, Poutine et sa bande pourront voler davantage et plus longtemps. C’est à peu près tout. Il n’y a là aucune vision ou projet politique, simplement une réelle intelligence tactique mise au service de l’avidité de toute une clique de nouveaux oligarques.
Poutine n’est que le chef d’une bande de voyous, elle-même à la tête d’un immense empire eurasien en reconstruction. D’ailleurs, ce fait même ne doit pas grand-chose à Poutine, l’idée date des années 1990 et a surtout été promue par le président kazakh Nazarbaiev. Poutine soutient plus ou moins le projet, puisqu’il n’y a pas grand-chose à perdre et beaucoup à gagner.
Cependant, cette non-stratégie ne peut continuer éternellement. De nouveaux courants idéologiques se nourrissant au passé glorieux de l’URSS (non, l’URSS n’a pas été l’échec total qu’on voudrait y voir) traversent la société russe et y trouvent un accueil très favorable (et pas seulement chez les vieux). Une campagne pour rendre le nom de Stalingrad à Volgograd est en cours en ce moment même dans tout le pays. La crise économique mondiale commence à s’infiltrer aussi petit à petit en Russie, ce qui va mécontenter le peuple, le rendant peut-être plus enclin à ouvrir enfin les yeux sur la réalité du pouvoir en place. Enfin, la manne des hydrocarbures se tarit petit à petit, pas encore pour le gaz, mais les réserves pétrolières du pays fondent à vue d’oeil. Il y a bien le pétrole de l’Arctique, mais son exploitation nécessite des investissements colossaux, qui, bien évidemment, ne sont pas prêts d’être réalisés avec à la tête du pays une mafia compradore dont le souci principal est de détourner le plus possible de pognon. De toute façon, la fin de la récré peut être sonnée à tout moment par l’effondrement possible à brève échéance des pays importateurs de l’énergie russe (ben ouais : la récession entraîne le chômage, qui entraîne une chute de la consommation qui entraîne une réduction de la production, ce qui réduit considérablement la demande en énergie). Or, il se trouve qu’à part l’énergie, la Russie n’a plus grand-chose à vendre, il suffit d’examiner la structure des exportations : 70% du PIB provient des hydrocarbures, le reste ce sont les ventes d’armes et un peu d’agroalimentaire. Toute la puissante industrie soviétique a été quasi entièrement liquidée tout au long de ces 20 dernières années. Nous voilà de retour en 1917...
Le renouveau va certes se produire, mais je le vois débuter plutôt dans 30-50 ans au plus tôt. La condition à son avènement, c’est que la mafia dégage du pouvoir, quitte à l’en faire dégager de force.
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