LE HAUT ET LE BAS
Très bon article, très clair, très précis et riche. Merci pour certains détails très importants.
Remarque : la naturelle et nécessaire convergence des principes supérieurs ne peut provoquer pour qui réfléchit (trop) qu’un relativisme (oui, mal d’une époque) qui ne peut avoir pour conséquence qu’un désir de syncrétisme (toujours réducteur, souvent intellectuellement déviant et potentiellement contre-nature de la détermination incarnée. Mais ce syncrétisme n’est pas un mal en soi : il peut évoluer vers les principes (ce pour quoi originellement et donc finalement il est naturellement fait), soit vers un approfondissement de chaque forme incarnée de ce principe (donc une dé-syncrétisation avec retour aux sources après le constat du Tout. Le mal est dans son utilisation sans « conscience ».
Ainsi le relativisme peut fonctionner aussi comme un stimulant vers l’absolu et non comme une démotivation nihilisante ou sceptique (bien que le scepticisme soit à sa place dans le relatif matériel). Le relatif semble mieux fonctionner encore comme nostalgie d’absolu que comme arme de destruction massive. Sans compter que cette arme de destruction massive a été d’abord construite par les dogmes monothéistes de l’exclusivisme de chaque forme instituée, créant par la une concurrence absolument relativisationnelle et non plus civilisationnelle (vers le haut), à prétention, en l’absence de principes (ré) affirmés, de principe supérieur (singulier ou pluriel : question piège). Là est l’inversion centrale tendant à nous faire prendre des vessies pour des lanternes.
Pas d’accord avec la position (qui est aussi celle officielle de l’Eglise par exemple) pour laisser croire que le syncrétisme par le bas est le seul possible. Par le haut la relativisation amène au principe de Respect qui lui-même implique le retour à l’Absolu. Sans nier aucunement que celle par le bas amène la démocratie du commerce et de la finance, dieu opposé directement aux Principes.
Mais le mouvement, à partir du relativisme « actuel » vers le bas, vers le haut est singulièrement absent de nos cerveaux, et ce ne peut être la conséquence d’un conditionnement de l’inconditionnable. Ce qui est absurde en soi, ou dans le principe.
Il semble qu’une entreprise de subversion globale, une « révolution culturelle », parfois présentée sous le label alléchant de contre-culture à des générations très jeunes, « généreuses » mais en recherche de repères après notamment le cataclysme « ontologique » programmé de la seconde guerre mondiale en occident, ait été mise sur pied à partir du New Age californien, recrutant parmi « les meilleurs esprits » de ces années 60/70 en vue de les manipuler pour former les nouveaux cadres « cools » d’une révolution mondiale conservatrice ultra-libérale. Il paraît que les révolutions suivent toujours les guerres...
Mais si la manipulation a fonctionné au delà peut-être même des espérances des instigateurs de cette imposture intellectuelle planétaire, c’est qu’elle avait d’abord préparé le terrain et pris le soin « méthodique » de « nettoyer » par une sorte de vide spleenétique le contenu et les cadres eux-mêmes des « vraies valeurs » de ce monde, habilement inversées ad absurdum ou brutalement anihilées (les deux mon capitaine).
Le terrain est le terreau, et même s’il s’oppose au transcendantal dans une autonomie très et trop à la mode, il n’en reste pas moins vrai que, tout en bas des valeurs relativisées, s’il a fini par prendre tout son poids « d’absolu subversif » (contradiction dans les termes), c’est qu’écrasés sous le poids des impostures du pouvoir intellectuel et culturel, les jardiniers subtils du jugement autorisé ont mille fois failli.
N’est-il pas trop facile de seulement pointer une kaliyugesque fatalité plutôt que la trahison des « élites », leur corruption achevée et leur perversion/subversion « totale » non encore parachevée ?
Sans elle évidemment rien n’eut été ni n’est jamais possible.
Quelle est la situation « ontologique » de cette pitoyable caricature spirituelle ? Comment a-t-elle pu être amenée à « finir » par considérer que son royaume était de ce monde ? Les malheurs modernes ne sont qu’une conséquence de cette chute, dans laquelle tous suivent très « démocratiquement », au sens le plus marchand du terme.
Il faut donc aussi regarder le « massacre par balles » dans la tête des élites, comment il fonctionne en s’appuyant sur un système « traditionnel » ultra-corrompu jusqu’aux ultimes ramifications de ses réseaux de conditionnement et de terreur intellectuelle les plus discrets, maillant « le » monde jusqu’au dernier « cadre » . Ceci est un fait de départ et d’arrivée, le pourquoi et le comment.
Cependant, les choses ne sont jamais simples mais toujours doubles : il demeure difficile de viser les personnes derrière qui agissent ceux qui tirent les impondérables et imperceptibles ficelles transformant imperceptiblement, par un moyen subtil ou un autre, tel « esprit » digne de ce nom en outil de saccage naïvement abusé cherchant sincèrement à faire bien.
Non qu’on puisse évidemment leur donner une sorte de statut victimaire, mais enfin il ne faut pas non plus se tromper de cible en ne visant que l’ombre, même derrière de riches leaders ou managers très officiels tout aussi manipulés que le new-âgiste moyen ou la ménagère de base personnellement dévelopée. Ils ne sont,eux aussi, que jouets de paille jetés aux chiens de la « révolution culturelle », activée aussi par ailleurs en sens inverse.
Il n’est ni « permis » ni même matériellement possible de parler de tout ça sans référence aux principes supérieurs qui ont orienté le monde jusqu’à la mondialisation de leur inversion. Ces références ne sont pas des gardiens de marbre cachés dans l’ombre des ruines fumantes de notre quotidien économique, psychologique ou émotionnel.
Mille fois d’accord sur le kaliyugesque constat mais concernant d’abord les conséquences d’une déviation des principes comme mal absolu, alors que les ravages de terrain restent relativement relatifs quant au plan qu’ils occupent, même si leur globlalisation, ajoutée au lien avec les principes de départ, finira par la destruction de ces principes sur un plan matériel essentiel et lié.
Puisque l’essentiel est bien le combat spirituel, plus violent parfois que le matériel si l’on en croit l’expérience de Rimbaud, on ne voit dans ce sens que peu de « sorties » hors de la Citadelle pour tenter de stopper la progression ontologique de la grave pathologie matérialiste qui nous submerge, nous envahit et nous trahit comme une sorte de virus. Ainsi « ici et maintenant », l’analyse n’est plus qu’une question d’approfondissement quantitatif.
Pour ce qui est de la qualité des gestes, nous pensons à l’admirable et méconnu « Affrontement chrétien » d’un Mounier, dont le courage, incroyable et encore inédit, le porta à récolter et ressemer les meilleurs fruits de la lucidité nietzschéenne concernant une humanité de qualité et une qualité humaine propre à affronter ce nouveau dragon intérieur, et pas seulement son reflet dans une époque, même moderne.
Il invite à une « autocritique » et à une critique sérieuse de l’embourgeoisement des spiritualités, de matérialismes spirituels, qui ne peut passer, à l’intérieur de chaque « tradition », que par un relèvement des valeurs vers leurs principes supérieurs, sans tenir compte du terrain. Ce que fit Mounier en entrant dans la Résistance. La guerre matérielle est finie, la spirituelle ne fait que commencer, derrière la psychologique, au delà des basiques et diversifs civilisationnel et culturel de masse.
En citant d’autres héros « modernes » de la relation absolue aux principes, on peut citer Bernanos, Camus ou Weil parmi d’autres, à un autre niveau que celui d’un Guénon, et puis certainement beaucoup de responsables de la première heure de la Restauration culturelle ou plutôt spirituelle avortée sans laquelle aucune révolution ou libération que ce soit n’aurait pu prendre racine, à un niveau encore plus modeste, mais combien du terrain, « terrestre ». Et tants d’anonymes et de « justes », « effacés » des mémoires.
(…) Dans leur combat déterminant au coeur d’un déterminisme qui ne compte, pour paraphraser Camus, que « dans la mesure où l’on y consent pas. » Si l’acceptation supérieure vaut, elle ne vaut que par un refus absolument terrestre de tout ce qui ne relève de ce monde que pour l’anéantir.
Une syncrétisation vers le haut n’a plus rien à voir avec les « valeurs » (relatives) : elle est intégratrice, non désintégratrice, principielle.
Il sera toujours difficile à croire pour un esprit aussi peu déterminé que possible, que d’authentiques « mystiques » comme Huxley ou Watts n’aient oeuvré que dans, pour et vers un syncrétisme de bas étage.
Au plaisir de lire une réponse qui, sans en douter un seul instant, ne manquera pas de perspicacité,
cordialement et fraternellement.
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