Il était une fois une grenouille et un scorpion.
Par un beau jour ensoleillé, la grenouille faisant bronzette, s’entendit interpeler par une voix lointaine.
- Ho là, la grenouille !
Dérangée, elle se tourna dans la direction de la voix.
Quelle ne fût point sa surprise de voir un scorpion.
- Que veux-tu ! Lui demanda-t-elle.
- Te demander un service. Répondit-il.
- De quoi s’agit-il ?
- Je voudrais que tu me fasses passer la rivière. Je voudrais me rendre en face.
- Mais on n’a jamais vu çà : un scorpion sur le dos d’une grenouille ! C’est contre nature.
- C’est vrai mais nécessité fait loi. Je dois traverser.
- Si tu n’étais point toi-même, peut être le ferais-je.
- Je comprends.
- Oui, tu pourrais me perdre !
- C’est vrai mais si je faisais une telle chose, je me perdrais assurèment. Ce n’est donc pas dans mon intérêt.
- Hum. Ton argument est fort. Je consens à te transporter. Mais avance sur ce rocher (un simple caillou affleurant) et de là grimpe sur mon dos.
L’animal s’exècute. Et voici que le monde découvre un spectacle inédit jusqu’alors, un équipage nouveau et contre-nature.
Des spectateurs se prennent à rêver. Se pourrait-il que le monde devint différent de ce que nous en savons ? C’est ainsi que le peuple composite des bords de rives se mit à deviser. la poule d’eau et le renard échangeant leurs points de vue sur l’état présent et passé des choses. L’ablette et la libellule faisant de même. Un grand brouhaha se développait lorsque soudain une voix cria :
- Regardez ! Regardez !
La grenouille et le scorpion avaient disparu, engloutis par les eaux.
Pendant que tous philosophaient sur un nouvel ordre des choses, la traversée avait tourné au tragique.
A mi-chemin, là où le flot est le plus tumultueux, la grenouille sentit une violente piqûre. Son corps s’engourdit si vite qu’elle n’eut que le temps de se retourner vers son passager et de lui demander :
- Pourquoi as-tu fait çà ?
- Pardonne moi, mon amie, c’était plus fort que moi ! Je n’ai pu résister à ma nature.
C’est ainsi que les deux périrent. Et du brouhaha des spectateurs, il ne resta qu’un silence atavique.
Morale : Il est dur de changer sa nature et encore plus d’y résister. Et ce contre les raisons les plus évidentes. Chaque jour nos sociétés offrent des spectacles contradictoires. On voit des gens en tuer d’autres au mépris des droits les plus élémentaires. Quand Homo sera mort, peut être que Sapiens sapiens sera. Pour ma part, je ne crois pas à une telle décomposition. J’aime la démocratie mais elle peut être vue aussi sous d’autres jours : La dictature de la majorité sur les minorités ; La dictature des médiocres sur celle des plus éclairés ; La voie la plus rapide pour les extrêmistes pour prendre le contrôle politique ; Une justification pour produire des élites et les déclarer représentatifs... etc.
De fait la démocratie est un régime politique qui cherche à rendre compatible toutes sortes de tendances, un régime qui cherche à dépasser momentanèment les contradictions propres à une société donnée. Elle ne satisfait jamais personne.
Quant à l’analogie « Entreprise/Société » qui justifie une fois admise l’autre analogie « les citoyens sont comme les actionnaires » car on parle de démocratie de l’actionnariat, elle permet de faire accepter l’idée qu’une société est une entreprise et qu’elle se gère comme telle : rentabilité, productivité, retour sur investissement, bénéfice, liquidation, etc. Voilà avec cette analogie on accepte toute la sémantique du domaine entreprenerial et on l’applique comme allant de soi. la société n’est pas une entreprise, ce n’est pas non plus une fourmillière. La société est la société. Une collectivité d’humains irréductible aux individus vivants qui la composent (il y a les morts et il y a les à-naître). Elle est complexe dans son fonctionnement qui lui est toujours chaotique. On doit faire attention à la sémantique car elle conduit à admettre comme intérêt général ce qui n’est qu’intérêt particulier.
Le communisme a échoué car il n’est rien d’autre que le retournement de l’idéologie entreprenriale : Faisons des citoyens des actionnaires : tout est à tous. Beaucoup de pages écrites et des crimes contre l’humanité à répétition.
On ne sait pas quel est le bon régime, la bonne organisation. On ne le sait pas parce qu’on ne pense pas. Et si on pense, on ne peut le faire qu’à partir de l’existant.
Et finalement avant de penser il faudrait régler ce problème :
On sait classer, depuis les travaux de Wilfried Wurmstein et Laetitia Paparazzi, datant des années cinquante, une population d’individus pris dans une catégorie socio-professionnelle quelconque en un certain nombre de catégories (dites « catégories de Wurmstein-Paparazzi »). On trouve :
" - 5 % de gens authentiquement intègres, dont les critères moraux sont relativement indépendants de leur environnement ou des circonstances.
- 20 % de sale cons agissants, uniquement préoccuppés par leur propre intérêt et capable d’à peu près n’importe quoi pour arriver à leurs fins
- 75 % d’indécis, susceptibles de glisser vers l’un ou l’autre de ces extrêmes en fonction des circonstances et de leur environnement.
Toutes les études ultérieures n’ont fait, finalement, que consolider ces résultats avec une remarquable stabilité. Toute l’histoire humaine contemporaine s’articule en fait sur la prise de conscience progressive de cette statistique de Wurmstein-Paparazzi."
La vie continue...
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