Héhé, on vous la fait pas à vous hein. Ah, l’affreux complot. De toute façon depuis le temps qu’on vous répète que ce sont tous des mauvais, vous devriez avoir compris. Après tout on ne trouve la mauvaise foi que là où on veut bien la voir. Les « chiraquiens » eussent-ils stratégiquement fait bloc derrière Sarkozy qu’on les aurait accusés de préparer sa chute discrètement depuis l’interne. S’aventureraient-ils dans une opposition frontale, on les jugerait égoïstes au point de vouloir faire perdre la droite en présentant un autre candidat, et en affichant l’image d’une droite divisée face à une gauche unie dans un magnifique et ridicule consensus, fruit d’un calcul bassement politicien né de la frustration du 21 avril 2002. La France boude, elle en a marre, alors elle élira Ségolène, na. Et quand elle aura terminé son petit caprice et qu’au bout d’un ou deux ans la politique de la « Madone » l’aura ramenée sur terre, plus dur sera le retour à la réalité...
Finalement, le constat revient à dire : mon dieu, il y a plusieurs courants à l’UMP ! Quel scandale ! Cachez ces divisions que je ne saurais voir. Ah c’est pas nous, les unis de la gauche, le bloc socialo-avant-gardiste, que ça concernerait, houla. Regardez comment qu’on a bien été disciplinés nous tiens. Nous on sait faire bloc. Et puis les petites attaques internes, comme si c’était notre style...
Heureusement, il y a suffisamment de hyènes pour s’emparer de situations comme celle-ci pour que le courant chiraquien de l’UMP se tienne prêt à éventer le piège. Il faut bien voir, pour qui souhaite évidemment garder les yeux ouverts, qu’une partie des média et partis de gauche souhaite absolument voir Sarkozy confronté à Royal, et nul autre candidat à droite. Le calcul est simple : on brandit le spectre de l’extrême-droite jusqu’au bout, bâton prêt à taper ceux qui ne respecteraient pas le devoir d’unité. Une fois un candidat-leader émergé dans chaque bord, on compte sur le capital-sympathie objectivement plus élevé de Ségolène Royal par rapport à son rival de la place Beauvau à l’image plus rigide et sécuritaire, ainsi que sur la sensation d’alternance qui découlerait de son élection, pour faire la différence. Tout dissident subira une punition médiatique.
Mais le problème de l’auteur, et de bon nombre de ses commentateurs ici présent, est qu’étant de base à gauche ils ne raisonnent que sous le signe de l’idéologie. Et de souligner les différences idéologiques certaines entre le courant sarkozyste et le courant chiraquien, pour mieux pointer du doigt le moindre événement pouvant s’apparenter à un coup bas, ou même un simple calcul. C’est faire bien peu de cas de la popularité encore élevée de l’UMP. Après tout, pourquoi être du côté de l’UMP aujourd’hui ? Il est bien plus simple d’être de gauche. On est moderne, humaniste, avant-gardiste, ouvert au changement, bref, sympathique par excellence... Comment diable pourrait-on encore décemment être de droite ?
Les adhérents de l’UMP eux, connaissent la réponse. Parce que loin du débat idéologique qui non seulement prime à gauche, mais influence sous son empire la vision de tout homme de gauche, ce que recherchent les votants UMP est avant tout un pragmatisme éclairé, dont la droite a souvent bien mieux su faire preuve que la gauche, autant se l’avouer. Et eux veulent encore croire à la manifestation effective de ce pragmatisme l’an prochain. Pas d’accord ? Comptez donc les points sous la Ve République, et on en reparle.
Résumons : la droite veut gagner, la droite ne veut pas sombrer dans les querelles idéologiques. Certes, comme tout grand mouvement cette droite modérée a ses désaccords internes, voire ses inimitiés personnelles que contrairement à ce que nombre d’entre vous doivent croire à ce stade je ne cherche ni à minimiser, ni à occulter. Elle va donc tenter de trouver le candidat qui la portera à la victoire. Celui-ci ne pourra pas faire l’unanimité, tout comme Ségolène n’a pu la faire comme aimeraient le croire certains, ignorant délibérément les enseignements du vote du 16. Mais en tant que candidat de la droite, si comme c’est probable il est investi, Nicolas Sarkozy portera les idées de la droite, non de Nicolas Sarkozy. N’est-ce pas, amis ségolénistes qui se sont tués à nous répéter qu’elle allait bien devoir porter les idées socialistes pour justifier son investiture ? Or pour qu’il porte les idées d’une majorité de la droite et non d’un simple courant, il faut qu’il y ait débat, il faut qu’il y ait opposition, et règlement sur certains points du programme à appliquer. Et aussi proches du parquet ses dents soient-elles, Sarko sait qu’il doit avoir conscience de cette réalité s’il veut gagner en mai.
De plus, l’UMP ne veut pas être assimilée au PS. Marquer clairement sa différence. Le PS a retranché le débat derrière le spectre du 21 avril et la soif de changement. Pour offrir une alternative crédible, l’UMP ne pourra pas tomber dans le même type de stratégie, mais au contraire ouvrir le débat. Et si ça va jusque-là, étudier les alternatives à Sarko sans les retrancher derrière le fort arrangeant prétexte du « vote utile » (nouveau nom politiquement correct pour forcer les électeurs à voter contre un candidat, et non pour un autre). Quitte à l’investir quand même par la suite. La droite présentera donc un, et un seul, candidat majeur. Paré pour gagner, et faire face à la vague démagogico-féministe. En présenter deux de front, ou provoquer une scission à six mois de l’échéance, relèverait du suicide politique, et le croire sérieusement serait faire bien peu de cas de l’expérience de vieux roublards comme Chirac ou Sarkozy.
Toutefois, il reste peu de temps, et il serait mauvais pour Sarkozy comme pour la droite qu’il confisque le débat au profit de sa popularité élevée. Les tensions actuelles sont donc parfaitement justifiées. Mais contrairement à ce qu’aimeraient croire beaucoup pour les conforter dans leur petite image facile du monde politique (et surtout de la droite : la droite, c’est mal) ce n’est pas une simple histoire de calculs personnels. Que le pilier de comptoir aviné le soir assène pesamment ce genre de chose, passe. Pas des gens qui se veulent réfléchis, et qui prétendent porter un regard un minimum lucide sur la façon de faire de la politique dans un parti qui ambitionne de gagner l’élection présidentielle. Les tensions vont donc durer encore un peu, avant de s’apaiser au gré des différents accords trouvés et d’un calendrier galopant qui rendra le besoin d’harmonie toujours plus pressant. Et ceux qui espèrent (plus secrètement du tout) un sabordage de la droite par elle-même en seront pour leurs frais. S’imaginer que Chirac pour sa sortie coulera son propre camp pour mener Royal à la victoire, par simple antipathie envers Sarkozy, et par effet placebo de certaines suggestions médiatiques, est simplement prendre ses désirs pour des réalités. Rester unie ne suffira peut-être pas à la droite pour gagner les élections, mais elle s’y présentera armée.
‘Pouvez vous lâcher sur les -1, ça ne plaît pas les opinions contraires comme celle-ci, mais l’avenir proche me donnera raison.
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