La question de l’existence ou la non-existence d’une chose n’a de sens que si l’on sait de quoi l’on parle.
S’agissant de Dieu, la situation « Dieu n’existe pas » n’a pas plus de sens que la situation « Dieu existe », on ne sait pas de quoi l’on parle, c’est le miracle du langage qui veut cela. Une chose n’existe pas forcément parce qu’on lui a donné un nom.
Le piège des croyants est le suivant : si Dieu existe, il est moral. Et c’est là que ça coince.
C’est pourquoi, le mot athée a été fort mal choisi pour désigner ceux qui ne croient pas en Dieu car on peut très bien dire « Dieu existe » et être athée : pour ce faire, il faut que ce Dieu soit pensé comme non moral au sens humain.
La question croyez-vous en Dieu ? est une question déloyale au sens où le mot moral est sous-entendu dans la phrase et ce non-dit, c’est le piège systématique que nous tendent les croyants pour nous faire avaler leurs élucubrations. Sous prétexte qu’une chose serait appelée Dieu parce qu’elle serait la plus proche de ce que, nous, nous pourrions mettre sous un vocable de ce genre, il faudrait en plus qu’elle soit morale au sens humain c’est-à-dire qu’elle ait, de façon éminente, ce que nous, nous estimons être une qualité. C’est de l’anthropomorphisme pur à peine déguisé. Comme disait Spinoza, si les triangles pouvaient parler, ils diraient que Dieu est éminemment triangulaire.
Puisque de notre point de vue d’humains sur une petite planète nommée arbitrairement Terre, il y a quelque chose, il n’est pas insultant pour la pensée de dire que Dieu existe, ça n’a en fait aucune importance puisqu’il peut être au moins égal à ce qu’il y a. La question n’est donc pas de savoir si Dieu existe, elle est de savoir ce qu’est Dieu ? Spinoza, qui donne quatre preuves de l’existence de Dieu (Éthique 11/I), reste le plus athée des philosophes.
La question à poser est donc : est-ce que le Dieu qui existe dans tous les cas de figure est, selon vous moral ? Si vous répondez oui, vous êtes croyant, si vous répondez non, vous êtes athée. On voit donc bien que l’athéisme n’a strictement rien à voir avec l’existence ou la non-existence de Dieu, il renvoie simplement à l’inexistence d’un Dieu moral. Pour un athée, Dieu c’est l’atome, c’est la Nature - Spinoza disait Deus seu Natura, Dieu c’est-à-dire la Nature (Appendice IV) - c’est l’Univers, c’est le hasard, c’est la nécessité, c’est le Big-bang, c’est l’ensemble des lois physiques, c’est la lumière, c’est la tautologie A=A etc. mais tout cela n’a rien de moral au sens humain. Cela signifie qu’il ne fait aucune différence, dans cette hypothèse, du point de vue de Dieu, qu’il y ait ceci plutôt que cela.
Nietzsche a résumé tout cela par cet aphorisme : au fond, seul le Dieu moral est réfuté.
Gilles
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