Pour ce qui est de l’intérêt, de l’opportunité et de la légitimité de constitutionnaliser la déchéance de la nationalité et l’état d’urgence :

- pour la déchéance de la nationalité : l’inscription dans la Loi fondamentale est absolument contraire à l’esprit constitutionnaliste qui veut qu’on sacralise les grandes questions sur la base d’une vision longue, et d’un recul important des éléments de la Nation (non pas sur l’impulsion soudaine d’un opposant à cette option qui réalise un revirement à 180 degrés du jour au lendemain) et sur la base d’un consensus également national. Voilà pour la légitimité, qui donc ici est nulle. De plus, cette manœuvre est quasiment sans intérêt pratique et inopportune. Sauf si on veut faire du populisme pur et dur au vu d’un sondage bête que les journalistes de la télé s’empressent de rappeler pour clore chacun de leur sujet rendant compte des arguments ou manifestations des opposants (80% des sondés seraient pour. Et alors ? Que vaut cela face aux vrais arguments ci-dessus énumérés ?). Cette action constitue un réel danger pour la démocratie !

- pour ce qui est de constitutionnaliser l’état d’urgence  : je dis qu’il était temps ! Cette question est trop sérieuse pour la laisser à la merci du seul législateur ou d’un chef d’Etat : il faut que la Nation réunie en congrès lui fasse revêtir la valeur supra légale et légitime que requiert ce type de sujet. Inscrire ce dispositif dans la constitution exigera de la part du Congrès de montrer la plus grande prudence dans la recherche d’équilibre entre sécurité et liberté. Cela permettra aussi d’actualiser le dispositif pour l’adapter aux exigences de notre époque. Mais ce n’est pas parce que la question est l’« état d’urgence » qu’il faut la traiter dans un état d’urgence total et au mépris des consultations et débats préalables indispensables. D’où ma conclusion : s’occuper de l’état d’urgence, c’est bien, mais traiter les tas d’urgences avec autant d’énergie et de conviction, ce serait encore mieux !