ADDENDUM.
Avant même d’avoir lu l’entretien que je citais dans ma précédente intervention, j’avais parlé de paranoïa tout en me disant que cela paraîtrait peut-être excessif - mais tant pis ! Je retrouve dans cet entretien que je cite au fur et à mesure de ma progression dans sa lecture, le même disgnostic inévitable. La fin de l’entretien, que je viens de lire, fait bien voir que la référence à cette pathologie bien connue n’est pas une façon de parler et une simple provocation destinée à faire réfléchir le lecteur.
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Quel pourrait être le modus vivendi entre l’extrême-gauche et l’extrême-droite au sein du méta-conspirationnisme que nous évoquons ? Dans le retour en force d’une rhétorique qui rappelle finalement celle de l’Abbé Barruel, celle d’un regroupement de personnes conspirant contre le peuple ?
Stéphane François :
Cette nouvelle phase conspirationniste est intéressante par son aspect polymorphe et polyculturel. Il est donc difficile de déterminer un modus vivendi précis, mais il est possible d’établir une critériologie, où l’on retrouve l’idée, comme vous le dites, d’un regroupement de personnes conspirant contre le peuple, avec un arrière fond quand même très antisémite.
La présence, ou l’absence de preuve, peut être un signe, un indice. Dans cette vision du monde, n’importe quel fait, ou non-fait, peut subir une importation au sein de l’explication conspirationniste. Il peut donc servir à en confirmer la validité. L’indice justifie l’explication autant que celle-ci est justifiée par lui… Bref, on est face à des paranoïaques, ou du moins à une forme de culture paranoïde.
La thématique du complot des élites est récurrente dans l’histoire des idées : on la retrouve à la fin du xixe siècle, dans les années trente, dans les années soixante… Comme un serpent de mer, elle réapparaît régulièrement. Mais il vrai que depuis le début des années deux milles, cette thématique explose, alors qu’elle avait disparu entre les années quatre-vingts et le milieu des années quatre-vingt-dix.
La principale difficulté de ce type de recherches est de définir des frontières entre : 1/des paranoïaques qui élaborent des théories du complot ou des théoriciens qui sombrent dans la paranoïa ; 2/l’amateur de théories conspirationnistes et celui qui y croit réellement ; 3/différentes formes de paranoïa : le délire paranoïaque pur, c’est-à-dire la folie, et le discours de type croyance permettant la compréhension d’un monde incompris. De plus, il existe des possibilités interactionnistes, en particulier lors de théories du complot, quand la réalité entretient la paranoïa. C’est le cas, par exemple, du 11 septembre 2001.
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