Qui a gagné la seconde guerre mondiale ?

L’idée défendue par mon article du 4 mars dernier était que l’enjeu symbolique du conflit Russie - OTAN en Ukraine est d’effacer l’Union Soviétique (et la Russie qui a pris le relais) du groupe des vainqueurs de la seconde guerre mondiale, et de lui contester toute zone d’influence en Europe. Les livres d’histoire en Occident ont déjà été plus ou moins révisés en ce sens.

Les appels du Président du Conseil de l’UE dans la foulée de Zelinski, Charles Michel, d’exclure la Russie du Conseil de Sécurité de l’ONU en tant qu’un des cinq membres permanents, vient renforcer mon propos. En effet qui sont les membres du CS de l’ONU ? Ce sont les vainqueurs de la seconde guerre mondiale plus la Chine. Exclure la Russie serait lui dénier le titre de vainqueur de la seconde guerre mondiale.

Quel est l’enjeu de ces grandes manœuvres politico-stratégico-idéologiques pilotées par les USA ? L’enjeu est la légitimité et la pérennité de la domination américaine sur l’Europe, et donc l’inexistence de l’Europe comme puissance géopolitique mondiale. C’est un succès sous l’acronyme OTAN.

Une lecture de l’histoire se dégage de ces grandes manœuvres : la seconde guerre mondiale (ainsi que la première) fut une sorte de guerre civile européenne, les principaux acteurs de cette guerre étant des régimes monstrueux (Hitler, Staline). Un juge arbitre (les USA) est venu siffler la fin des hostilités et a depuis autorité sur le continent européen, sur la politique européenne.

Les descendants des hitlériens ont pu être recyclés par les USA dans l’UE, mais les descendants des staliniens posent toujours problème : ils ne se rendent pas et n’ont pas avoué leurs péchés. Le racisme hitlérien a été effacé mais seulement pour partie : de ce racisme tous azimuts, on a quand même gardé un profond racisme russophobe hystérisé avec la guerre en Ukraine pour les besoins de la cause géostratégique.

Les petits et moyens pays européens qui ont fricoté avec Hitler avant, pour la plupart d’entre eux, d’être victimes de Staline ne la ramènent pas. Ils ont besoin d’un protecteur et les USA leur conviennent parfaitement. L’UE, vu son inexistence géopolitique, ne peut jouer ce rôle de protecteur des « petits ».

La question se pose pour la France et l’Allemagne. Cette architecture défendue par les USA les satisfait-elle ? Réponse positive jusque aujourd’hui, nos généraux étant ravis d’être dans l’OTAN qui leur offre des opportunités de carrière (ils speak l’américain !), les généraux allemands aussi. Nos politiques sont sur cette ligne, sans parler de nos médias qui en rajoutent dans l’idéologiquement correct et la soumission obscène.

Est-ce durable ? Je me pose la question car ces grandes manœuvres pour réviser l’histoire de la seconde guerre mondiale peuvent avoir une autre conséquence que l’exclusion de la Russie : le réarmement de l’Allemagne et donc l’effacement de son statut de vaincu de la guerre. Dans un monde bipolaire USA
- Chine, une Allemagne « gaulliste » pourrait relever la tête et jouer un jeu subtil entre ces deux pôles. Les agressions économiques des USA contre l’Europe et surtout contre l’Allemagne (politique des sanctions et impact des contre sanctions, destruction de NS1 et 2) pourrait favoriser une telle évolution.

Quid de la France dans ce contexte ? Difficile à anticiper, le gaullisme étant bien mort, ainsi que l’industrie au contraire de l’Allemagne. Nos élites YL (young leaders) sont ravies, comme nos généraux, ravies d’être nominées aux Oscars de la politique, et n’ont aucun rêve d’autonomie, de puissance et de gloire pour leur pays, la « gloire » nationale étant devenu un mot obscène dans l’idéologie mondialiste. L’extrême droite au pouvoir, ou l’extrême gauche seraient-elles dans un état d‘esprit « géopolitique » différent ? A voir.