Bonjour à tous et merci pour vos commentaires et pour vos questions intéressantes. Beaucoup de vos interrogations ont déjà trouvé réponses grâce aux différents contributeurs, mais voici ce que je voudrais vous dire.
L’interrogation « pourquoi l’espéranto » est très pertinente. En effet, vous avez l’air de savoir et je vous en félicite, qu’ont existé des dizaines de projets de langue internationale. Mais le mot est lâché, il s’agissait de projets. L’espéranto, lui, a accédé au statut de langue vivante, et si à ses débuts il a bien été un projet, c’est aujourd’hui une langue moderne, présente dans tous les champs du langage et utilisée dans tous les médias. Bien sur, votre question mérite d’être posée, mais à mon sens, l’espéranto est une langue dont on a maintenant une expérience et un recul séculaire, en quelque sorte il possède une certaine maturité qu’il serait difficile à rattraper. Bien sur, tout ceci est une opinion personnelle, mais pourquoi refaire ce qu’il existe déjà ?
A Deneb qui laisse sous entendre que l’espéranto n’est pas « une vraie » langue, je répondrais que, si c’est à cela qu’il réfère, l’artificialité de l’espéranto est à relativiser. A partir de quand doit-on considérer qu’une langue est artificielle ? Par exemple, combien de règles grammaticales, orthographiques ont été décrétées pour donner au français la forme dans laquelle il nous est parvenu ? Un certain nombre de langues modernes sont sans doute toutes autant « artificielles » que l’espéranto, au sens où vous l’entendez. Ainsi, regardez l’histoire du norvégien, de l’hébreu moderne ou de l’indonésien. Leur « création » est parfois même plus récente que celle de l’espéranto. Sont-elles des « fausses » langues pour autant ? De même que toutes les langues, l’espéranto est le prolongement d’un héritage linguistique millénaire, à la différence d’autres langues, sans doute plus cohérent.
Deneb, laissez moi vous dire également que je suis très content de pouvoir vous comptez parmi les amoureux des langues. Même si vous dites que ce sont les circonstances qui vous ont porté à les apprendre, vous avez l’air d’y prendre du plaisir et d’apprécier cet apprentissage malgré tout. La plupart des espérantophones ont une haute estime de la diversité linguistique et souvent sont comme vous, très enclins à apprendre de nouveaux idiomes. A l’heure actuelle, les gens ne peuvent plus vraiment apprendre les langues qu’ils veulent et par intérêt. Dans notre système scolaire, la grande majorité des élèves n’ont le choix vraiment qu’entre 2 ou 3 langues, et souvent parmi ce choix restreint, une en particulier s’impose plus que les autres. Bien sur, le discours officiel me fera dire qu’une bonne cinquantaine de langues peuvent par exemple faire l’objet d’un examen en option au baccalauréat, mais comparé aux langues phares, combien de lycéen recourt à cette possibilité ? En enseignant par exemple l’espéranto en primaire, en insistant sur ce qu’il a de commun avec d’autres idiomes, on donnerait aux élèves une très bonne introduction aux langues et à leur apprentissage, tout en leur permettant d’avoir accès à la communication internationale, un droit fondamental qui ne doit pas être l’apanage d’une élite, de membres d’une catégorie linguistique particulière ou d’un groupe de personnes ayant un niveau d’éducation plus élevé. Les enfants pourraient par la suite au collège avoir plus de choix dans les langues qu’ils veulent apprendre et se déterminer par intérêt et par goût plutôt que par obligation.
Pour revenir au fait que vous ayant appris beaucoup de langues, on ne peut pas imposer à tout le monde d’en apprendre une dizaine et de toutes façons, cela n’aide pas à leur conservation car dans la pratique, le plurilinguisme tel qu’il est prôné actuellement contribue sournoisement plus au renforcement d’une seule langue qu’au renforcement de toutes. Le plurilinguisme sans l’emploi parallèle d’une langue neutre pour éviter la tentation d’hégémonie d’une langue nationale sur une autre ne fonctionne qu’en théorie.
En ce qui concerne la « futilité » du débat autour de l’espéranto, je vous répondrais ceci. Vous savez, la question linguistique n’est pas a minimiser. Au delà d’une problématique culturelle, il en va de la démocratie. La traduction a ses limites. Elle permet peut-être aux membres de nos institutions de communiquer, mais en tant que particuliers, nous ne pouvons pas nous payer des interprètes à chaque fois que nous voulons adresser la parole à notre voisin. Soyons logiques et je dirais même réalistes, si nous voulons construire une union politique véritable au sein de l’UE, donnons aux citoyens les moyens de l’accès au débat européen, tout en respectant l’identité linguistique de chacun. L’espéranto peut incarner ce moyen, comme langue inter citoyenne. A l’heure actuelle, le projet européen est en panne de vitesse. Il n’y a plus de vision claire de la part des citoyens sur l’avenir de l’Europe. Selon moi, il s’agit de développer une démocratie européenne du citoyen au niveau de l’UE. Étant européen, je ne désespère pas que vous puissiez comprendre les enjeux de la possibilité de l’échange intercitoyen équitable, dans une Europe non hégémonique, respectant la diversité linguistique et culturelle dans les faits. Avoir une réflexion sur la place de l’espéranto dans l’UE est pour moi essentiel, quelques soient vos opinions, je vous invite à vous interroger sans a priori et vous engage à vous renseigner sur la question.
Bien cordialement.
Sciuro.
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