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sisyphe sisyphe 3 août 2008 14:14
Usages raciaux de la génétique : importante déclaration
22 jui 2008Par Thomas Heams

Attention, le texte dont je vais vous parler aujourd’hui est important.

Alors que les progrès de la génétique et de la génomique laissent parfois croire que l’on peut tout dire d’un homme en regardant ses gènes, au risque de toutes les dérives, il était temps de démythifier cette question.

 

Car bien sûr, plus nous connaisons précisément le génome humain, plus nous sommes capables d’avoir d’information sur lui, et parfois sur ses origines géographiques. Il ne faut pas se le cacher. Mais par ailleurs, nous prenons aussi conscience de la multiplicité de manières qu’il y a d’être, allez, Noir ou Blanc par exemple. Il en résulte un paradoxe déroutant : selon le discours que vous tiennent les généticiens, ces derniers peuvent soit laisser entendre que la génétique confirmerait l’existence de races humaines, soit exactement l’inverse. La solution à ce paradoxe, c’est que les progrès de la génétique permettent de minimiser la probabilité de se tromper sur, par exemple, la couleur de peau d’un individu, mais cela reste une probabilité, et il y a toujours de contre-exemples qui montrent que les catégories raciales ne tiennent pas debout. Dans le même ordre d’idée, la notion de race humaine est intrinsèquement invalide parce qu’on est incapable d’en tracer les contours précis, d’y affecter les métis, et qu’il n’y a en fait qu’une variation continue, par exemple de couleur de peau, entre tous les humains. Pas des catégories, juste des individus...donc être « noir » ou « blanc » n’a pas biologiquement beaucoup de sens. A partir de quand est-on Noir ? À partir 37%, ? à partir de 69,4 ? on peut épiloguer à l’infini et il n’y a pas d’objectivité possible...

Ce sont ces questions notamment qui ont agité un groupe de chercheurs de l’Université de Stanford pendant plusieurs mois, au sein duquel de très très très grosses pointures de la génétique, comme par exemple Luca Cavalli-Sforza.

Ils ont présenté les résultats de leurs réflexion, fait inhabituel, sous la forme d’une lettre ouverte, d’une déclaration en 10 points dans la revue Genome Biology. Ils y expliquent que cette déclaration se veut un point de départ pour débattre, et de fait, elle donne un très bon aperçu de la manière dont on peut garder la tête froide sur ces questions. Elle vous donne une idée des faits qui sont actuellement objectivement établis par la communauté scientifique. Je vous propose une traduction, la première en français à ma connaissance, des dix articles de cette déclaration. Dans l’article original qui est en accès libre, les auteurs proposent aussi une introduction et une conclusion, et explicitent chacun des articles par des commentaires intercalés. J’ai décidé de me limiter à une traduction des articles stricto sensu, traduction littérale car chaque terme est important, mais me suis permis de glisser après chaque article une version ou un commentaire plus accessible, en italique, pour vous en expliquer l’enjeu.

Ce texte, je vous le garantis, va marquer.

Article 1 : Nous pensons que l’idée selon laquelle les variations génétiques au sein de l’humanité justifient des catégories hiérarchiquement organisées de races et d’ethnies est dénuée de toute base scientifique.

[commentaire TH : La notion de race humaine n’a pas de bases scientifiques]

Article 2 : nous reconnaissons que des individus de deux populations géographiquement distinctes ont plus de chances d’avoir des différences sur chaque point de génome que deux individus issue d’une même population géographique.

[commentaire TH : Des individus de populations différentes ont plus de chance d’être éloignés génétiquement que des individus de la même population (mais « plus de chance », ca veut dire que ce n’set pas forcément de cas, qu’il peut y avoir beaucoup de contre-exemples ! Et que donc la notion de race est infondée )]

Article 3 : Nous pressons ceux qui utilisent l’information génétique pour ronconstituer l’origine géographique d’un individu d’inclure ces résultats dans le contexte plus large de l’origine globale de cet individu.

[commentaire TH : Exemple : Des individus sont parfois hâtivement qualifiés de « Noirs » parce qu’une partie de leur information génétique permet de le dire. Néanmoins, si l’on élargit le spectre de l’investigation,on peut quasiment à coup sur trouver dans leur gènes des traces d’ancêtres « Blancs ». Il y a donc une très grande subjectivité et partialité a décréter qu’un homme est « génétiquement » d’une race ou d’une autre, qui dépend du choix des zones sur l’ADN qu’on décide (subjectivement) de regarder...]

Article 4 : nous reconnaissons que les catégories raciales et ethniques apparaissent et sont dépendantes des contextes sociopolitiques et ont changé de sens au cours des époques

[commentaire TH : Les données génétiques ne s’accordent vraiment pas toujours à la vision sociohistorique de ce qu’est une race, dans un contexte donné ( et qui change au cours de l’histoire). Les auteurs donnent le cas des « Hispaniques », terme unique qui masque des histoires et des contextes sociopolitiques très variés.]

Article 5  : nous mettons en garde contre la naiveté qu’il y a à invoquer des explications génétiques pour expliquer les différences entre groupes à propos des caractères complexes, notamment les comportements humains tels que les scores de QI, la tendance à la violence, ou les performances athlétiques.

[commentaire TH : On a souvent beau jeu d’invoquer la génétique pour ces questions-là, et de négliger le contexte environnmental. Ceux qui pensent qu’on peut facilement trouver les « gènes » d’un caractère complexe comme un comportement, en l’isolant des influences de l’environnement, sont très naïfs...Et le sont plus encore quand il pensent qu’on peut généraliser ces résultat à tout un groupe.]

Article 6 : Nous encourageons tous les chercheurs qui utilisent des catégories raciales ou ethniques à décrire comment chaque individu est assigné à une catégorie donnée, à expliquer pourquoi des individus de cette catégorie ont été inclus dans l’étude, et de déclarer si oui ou non les catégories raciales ou ethniques utilisées sont des variables de l’étude considérée.

[commentaire TH : Eh oui ! Il est toujours tellement simple de dire qu’on a trouvé un gène spécifique d’une « race » ou d’une « ethnie » tant qu’on n ’a pas dit exactement comment on a constitué les groupes d’individus étudiés... Si on a gardé que ceux qui vont dans le sens de ce qu’on veut montrer, on n’a pas prouvé grand chose... Barak Obama, métis, on le met dans la catégorie Noir ou Blanc ?]

Article 7  : nous décourageons l’utilisation de la « race » comme approximation de la ressemblance biologique et nous soutenons les efforts pour minimiser le rôle des catégorie de race et d’ethnie en médecine clinique, par l’intérêt apporté à l’individu plutôt qu’au groupe.

[commentaire TH : Inutile d’utiliser le terme de race à tout bout de champ, par facilité, notamment en médecine..]

Article 8  : Nous encourageons le financements d’études interdisciplinaires de la variation génétique humaine incluant un large spectre d’experts issus des sciences sociales, des humanités, et des sciences naturelles.

[commentaire TH : La génétique a besoin de toutes les autres disciplines pour contribuer à expliquer les variations humaines]

Article 9  : Nous pressons les chercheurs, ceux qui s’expriment dans les médias, et ceux qui sont impliqués dans des travaux de vulgarisation de contribuer à éviter l’insistance excessive sur la contribution de la variabilité génétique à la variabilité phénotypique

[commentaire TH : Ne pas surestimer la génétique pour expliquer les variations d’apparences entre individus [au détriment des autres sources de variations, environnementales, sociales, familiales etc]

Article 10  : Nous recommandons que l’enseignement de la génétique inclue l’information sociohistorique sur les usages passés de la science dans la promotion du racisme, ainsi que sur l’impact potentiel de politiques [biologiquement assistées] à venir ; nous encourageons un financement accru pour le développement de matériel pédagogique adapté à l’enseignement secondaire et supérieur.

 smiley smiley


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