Bon maintenant pour rentrer plus avant dans le débat, moi aussi je vis du droit d’auteur. Je ne suis pas artiste, mais j’écris des logiciels.
Et justement l’édition de logiciels est touché par le phénoméne du piratage industriel depuis les années 70. Cela ne l’a pas empéché de prospérer comme vous devez le savoir. Pourquoi ? Parce que cette industrie a toujours trouvée un moyen de fidéliser sa clientèle et de lui offrir les produits qu’elle recherche.
Mais il y a eu un problème particulier avec le domaine artistique c’est l’aveuglement des dirigeants de cette industrie. Dès le début des années 90 il devenait évident que la musique numérisée allait circuler aussi facilement que des logiciels et donc que l’industrie de la musique allait être confrontée au mêmes problèmes. La réaction des ayants droits a été de freiner des deux fers. Dans les années 90 justement alors que le MP3 commençait à se répendre, les gens du disque avec qui vous discutiez vous disiez en gros qu’il fallait être timbré pour utiliser un PC comme chaine hifi et que si les gens le fesaient c’était juste pour ne pas payer. Je me souviens encore à la fin des années 90 quand ce représentant d’universal était passé dans notre école et qu’on avait tenté de lui expliquer certaines choses. Les arguments des étudiants étaient grosso-modo les suivants :
- Le MP3 permet de tester de la musique avant d’acheter ce qui plait. Et comme la radio ne passe que de la merde c’est le seul moyen. Les étudiants écoutaient à l’époque beaucoup de techno et autres musiques électroniques qui n’avaient souvent pas droit de cité à la radio ou alors que très rarement. Comment dans ces conditions découvrir des artistes que l’on aimes ? Parce que la musique de NRJ on n’en voulait pas. Et bien à cette époque, ou les procès et mesures de rétortion n’avaient pas commencées nombre de gens étaient à la fois pirate pour découvrir et acheteur quand ils trouvaient un disque qui leur plaisait. La plupart de ceux la sont passés pirate à plein temps quand les maisons de disque ont sorti des CD qui ne se lisaient plus sur un PC. Pourquoi ? Parce que le PC était notre seul lecteur musical et que l’on avait pas de chaine hifi !
- Le MP3 c’était pratique à transporter. Entre ramener 50 Kilos de disques pour organiser une soirée ou déplacer un ordinateur portable, il y avait une solution qui était plus simple que l’autre. Et de fait, de plus en plus de gens lorsqu’ils achetaient un CD commençaient par le numériser. Lorsque l’on disait à l’époque que beaucoup de gens étaient prêts à acheter de la musique numérique, ces gens la nous prenaient pour des frappadingues. On ne demandait pas forcément la gratuité, mais une facilité d’usage qui était devenue possible.
- Si les ayants droits ne voulaient pas distribuer eux mêmes de la musique numérique, ils auraient pu accepter de donner des droits de façon automatique et simple. (Déclaration mensuelle de ce qui est téléchargée suivi d’un chèque à prix catalogue, point barre). Ils n’ont pas compris que la technique permettait certains usages et que les gens voulaient en profiter.
La vérité c’est qu’à cause de la bétise de nombre d’ayants droits, les pirates ont eu pendant très longtemps un meilleur confort d’usage et un meilleur produit que les utilisateurs honnétes. Et c’est ainsi que nombre d’utilisateurs ont perdus l’habitude de payer pour de la musique ou de la location de DVD. Et lorsque les mesures répréssives sont venues alors mêmes que ces crétins s’obstinaient à blinder de DRM pour punir leurs clients honnétes, beaucoup se sont détournés du marché de la musique enregistrée en espérant qu’ils allaient réfléchir.
Cette réflexion en 2008 n’est toujours pas menée. On ne peut toujours pas diffuser de la musique sur internet sans autorisation préalable (l’équivalent du compulsory licensing des radios américaines) à tarifs RAND (Random and Non Discriminatory courants dans la propriété intellectuelle des logiciels). Tant que cela ne sera pas fait, l’offre légale ne décollera pas car les vieux qui gérent les maisons d’éditions ne semblent pas capable de comprendre ce que le marché demande. Or, la seule façon qui marche pour contrer le piratage c’est une offre légale de qualité qui n’offre pas seulement de la distribution de musique mais un vrai service autour. Le marché du cinéma rencontre les mêmes problèmes.
Et la presse s’appréte à rencontrer les mêmes problèmes dès 2009 avec l’arrivée du papier électronique. Cela dit elle semble s’être pas trop mal préparée à ce changement et je suis pour l’instant agréablement surpris du nombre d’offre légales. C’est pour l’instant ceux qui se sont le mieux préparés. Bien sur il manque encore des choses, mais si ils réalisent ce qu’ils doivent tout devrait bien se passer. Par contre le marché de l’édition du livre lui n’est pas prêt du tout et ne veut pas voir la déferlante du papier électronique. Dommage pour lui, car si les offres légales n’arrivent pas, le piratage remplira l’espace vide.
Chers ayants droits je suis en effet désolé mais le gros des problèmes que vous rencontrez sont liés au fait que vous n’avez pas voulu offrir au marché ce qu’il demandait et était prêt à payer. En conséquence, la nature ayant horreur des espaces vides, le piratage est devenu endémique. Mais regardez ce qui se passe dans le secteur du logiciel et vous verrez que malgré le piratage il est possible de faire de l’argent !