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Dickin 4 janvier 2009 15:43

Bonjour,

Tout d’abord, avant de vous faire part de mes critiques, je tiens à dire que je considère les êtres vivants comme des "systèmes auto-organisés", radicalement différents des objets inanimés et des machines, car dotés d’une activité autonome. J’essaie de penser cela dans un cadre strictement matérialiste et déterministe, sans faire intervenir aucune puissance surnaturelle, "force vitale", ou autre phénomène dont les modalités seraient inconnaissable (y compris la providence laïque du hasard des mutations et de la sélection naturelle) ou improbables (programme génétique).

1) Aristote et l’ordre de la nature.

Votre critique du programme génétique et des théories de l’auto-organisation se fonde donc sur une critique de la vision aristotélicienne du monde, que selon vous ces différentes théories reconduisent plus ou moins explicitement.

Si votre critique des conceptions aristotéliciennes est juste, je suis très sceptique quant votre manière de les voir partout encore à l’œuvre, et surtout d’y ramener, à l’aide d’amalgames et de contresens parfois assez grossiers (il faut bien le dire), les théories de l’auto-organisation. J’ai l’impression que vous commettez là une erreur de raisonnement assez considérable.

Aristote n’était pas un abruti mystique : il a observé l’existence d’un ordre dans la nature et il en a donné une interprétation en termes d’essence, de finalité, etc. Ce n’est pas parce que cette interprétation est erronée, que cet ordre n’existe pas et ce n’est pas parce que l’on observe un ordre dans la nature que l’on est obligé de l’interpréter comme Aristote.

Vous semblez commettre ici la même erreur de raisonnement que Darwin il y a 150 ans :

"Si les biologistes d’aujourd’hui ne peuvent concevoir l’idée d’un ordre naturel dans l’évolution des espèces et vantent la contingence en ce domaine comme remède à la finalité, c’est parce que Darwin, en réaction à ses idées de jeunesse, a faussement imaginé qu’un tel ordre ressortissait obligatoirement à la théologie naturelle prônée par un clergyman du XVIIIe siècle (William Paley, que Darwin étudia assidûment à Cambridge). Les chimistes peuvent se réjouir de ce que Mendeléev (1834-1907) n’ai jamais lu Paley, et les cristallographes de ce qu’apparemment René-Just Haüy (1742-1822) n’en ait jamais entendu parler (bien qu’il fut prêtre lui-même et son contemporain), sinon ni la classification périodique des éléments chimiques, ni les systèmes de symétrie des cristaux n’auraient vu le jour."

André Pichot, Histoire de la notion de vie, éd. Gallimard TEL, 1993, p. 837-838.

Il y a donc un ordre dans la nature et ce n’est pas seulement une invention subjective, mais une réalité objective. Il est vrai que lorsque l’on ne veut pas admettre la spécificité de certains corps au prétexte fallacieux que cette spécificité ne peut être définie dans l’absolu et de manière univoque, comme vous le faites, ont ne peut plus discerner aucune espèce d’ordre ni d’organisation dans la nature ni chez les êtres vivants. Mais il s’agit la encore d’une grossière erreur de raisonnement : la spécificité ne se définit pas dans l’absolu (comme Dieu seul pourrait le faire, s’il existait), mais bien relativement aux autres corps. La spécificité des êtres vivants se définit par rapport aux objets inanimés et aux machines, par exemple.

A vous lire et à bientôt.


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