CÉSAR
C’est ça ! Insulte la clientèle au lieu de te perfectionner dans ton métier ! Eh bien, pour la dixième fois, je vais te l’expliquer, le picon-citron-curaçao. (Il s’installe derrière le comptoir.) Approche-toi !
(Marius s’avance et va suivre de près l’opération. César prend un grand verre, une carafe et trois bouteilles. Tout en parlant, il compose le breuvage.) Tu mets d’abord un tiers de curaçao. Fais attention : un tout petit tiers. Bon. Maintenant, un tiers de citron. Un peu plus gros. Bon. Ensuite, un BON tiers de Picon. Regarde la couleur. Regarde comme c’est joli. Et à la fin, un GRAND tiers d’eau. Voilà.
MARIUS
Et ça fait quatre tiers.
CÉSAR
Exactement. J’espère que cette fois, tu as compris.
(Il boit une gorgée du mélange).
MARIUS
Dans un verre, il n’y a que trois tiers.
CÉSAR
Mais, imbécile, ça dépend de la grosseur des tiers !
MARIUS
Eh non, ça ne dépend pas.
Même dans un arrosoir, on ne peut mettre que trois tiers.
CÉSAR (triomphal)
Alors, explique moi comment j’en ai mis quatre dans ce verre.
MARIUS
Ça, c’est de l’arithmétique.
CÉSAR
Oui, quand on ne sait plus quoi dire, on cherche à détourner la conversation.
Extrait de Marius mais étrangement d’actuallité avec l’obstination du plus haut personnage de l’Etat à dire que sa politique ne peut connaître aucune alternative et ses calculs très approximatifs (cf : les 8 milliards de perte de taxe professionnelle qui sont en fait de 28 milliards).
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